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L'origine des différentes "tribus" Wé

Cah. ORSTOM, ser. Sci. hum., V, no 4-1968.
LA MISE EN PLACE
DES POPULATIONS GUÉRÉ ET WOBÉ
Essai d'interprétation historique des données
de la tradition orale
Première Partie
PAR
Alfred SCHWARTZ*

INTRODUCTION
ChUpifI'epretkY : SOCIÉTÉ PRÉCOLONIALE ET ÉQUILIBRES TRADITIONNELS
I. LES GRANDS TRAITS DE L'ORGANISATION SOCIALE TRADITIONNELLE
A. Les unités territoriales
B. Les unités familiales
II. LA MISE EN PLACE DU PEUPLEMENT
A. Implantation géographique : étude de détail
1" Les populations dites wobé
A. LES GBÉON
1. Les Gbéan
2. Les Kouao
3. Les Tao
4. Les Tebao
5. Les Kirou
6. Les Glao
La seconde partie de cette étude paraîtra dans un numéro suivant des Cahiers ORSTOM, série Sciences Humaines.
* Section ORSTOM, Sciences Humaines, 22 rue Bayard, Paris-S".
Alfred SCHWARTZ
B. LES Zo~o
1. Les Péomé
2. Les Pléhou
3. Les Nidrou
4. Les Saho
C. LESBAON
1. Les Sémien
2. Les Koua
3. Les Blaon
4. Les Wéhia ou Saho
D. LES ZOUAGNON
2" Les populations dites guéré
Les populations entre Sassandra et Kô-Nzo
A. LES ZIBIAO
1. Les Zibiao-Kwéa
a) Les Zibiao
b) Les Tahouaké
2. Les Zibiao-Zoinhi
U) Les Niaho et les Goléo
b) Les Glaon
C) Les Séhou
d) Les Tiéméo
B. LES ZAGNÉ
1. Les Sebahon
2. Les Tkenien
3. Les Vahon-Djimahon
4. Les Gbowon
5. Les Debohon ou Winlo
C. LES ZAGNA
1. Les Bilou
2. Les Guéo
3. Les Tiémesson
4. Les Séhou
5. Les Tiètan
6. Les Blaon
D. LESzAH.4

LA MISE EN PLACE DES POPULATIONS GUÉRÉ ET FVOBÉ (1,' PARTIE)
INTRODUCTION
Les populations dites guéré et wobé, fortes de 200 000 individus environ, s'inscrivent approximativement,
dans la zone forectière de l'Ouest ivoirien, dans un triangle isocèle dont la base est constituée
par le fleuve Sassandra, entre les parallèles 5050' et 7043' de latitude Nord, et le sommet par le centre semiurbain,
de Toulépleu, aux confins du Libéria.
Le but de ce travail est, en un premier temps, de chercher à partir des données de la tradition orale (1)
comment s'est effectuée la mise en place des différents groupements guéré et wobé, et de tenter une interprétation
historique des résultats obtenus ; en un second temps, d'étudier l'impact de l'établissement,
après la pénétration coloniale, des structures administratives nouvelles sur l'organisation traditionnelle
du peuplement.
Mais avant d'entreprendre cette investigation il convient tout d'abord de préciser le sens et la
portée de la distinction terminologique Guéré-Wobé ; ensuite d'exposer brièvement notre démarche
méthodologique.
1. La distinction Guéré - Wobé
La question qui nous préoccupa en permanence tout au cours de notre enquête fut de savoir si la
distinction terminologique Guéré-Wobé traduisait une différence ethnique réelle ou n'était que la conséquence
d'une conjoncture historique particulière. En d'autres termes, les populations guéré et wobé
constituent-elles une seule et même ethnie ou deux ethnies différentes ?
La tradition orale, du Nord au Sud et de l'Est à l'Ouest, ne fait état que d'un seul terme pour
désigner l'ensemble des groupements actuellement appelés guéré et wobé. Ce terme est Wè, ou Wèon ou
encore Wènion, et signifie (( les hommes qui pardonnent facilement » (+VEa, voir pitié de, pardonner facilement
; 0, ou ~0, homme). Ni le terme Guéré, ni le terme Wobé n'existaient dans la société traditionnelle,
mais furent créés par l'administration militaire, au moment de la conquête, sur la base d'un malentendu
à la fois géographique et linguistique, dans les conditions suivantes (2) :
- Le ferme Guéré : la pénétration du futur pays (( guéré » s'est faite par le Nord, à partir du poste
de Logoualé. Parvenu sur les bords du Kô, qui marque la limite orientale du pays dan, l'officier commandant
la colonne de pacification s'enquit du nom des populations habitant « de l'autre côté de la rivière ».
Il lui fut répondu qu'il s'agissait des « Guémin ». littéralement « les hommes de Gué » (Gzféo en « Guéré 1)).
groupement que les Dan connaissaient bien pour lui avoir souvent fait la guerre, mais qui n'était en réalité
que l'antenne la plus septentrionale de la confédération guerrière Zagna. Cette appellation fut officiellement
retenue en 1911 par 1'Administrateur du Cercle du Haut-Cavally, le capitaine Laurent, qui, pour
désigner l'ensemble des populations au sud des Dan, ((leur a appliqué la dénomination Guéré ou Gué
en usage chez leurs voisins du Nord » (3). La désinence ré de Guéré semble être une déformation du terme
Dan mE, homme. Gué-mË, les hommes de Gué ;
(1) Accessoirement des archives accessibles soit sur place, soit à Abidjan.
(2) Nous tenons cette information de Daho Pierre, chef du canton Zagna de la Sous-Préfecture de Bangolo. Elle nous
fut confirmée par de nombreux autres informateurs.
(3) Capitaine Laurent ; Monographie du Cercle du Haut-CavaIly 1911. Document manuscrit. Archives Nationales.
Abidjan.
S Alfred SCHWARTZ
- Le terme Wobé : il nous fut impossible de déterminer dans quelles circonstances exactes (la
colonne militaire venait-elle de Séguéla ou de Man) et à quelle date est né le terme Wobé. Mais le processus
qui nous fut d6cri.t est identique au précédent. A la question de savoir par quel terme étaient désignées
les populations dont on allait entreprendre la conquête, il fut répondu qu'il s'agissait des IVè, et l'interprète,
qui était Dioula, s'exprima par les termes « w-b& )). (( Là-bas ? Ce sont les Wé )I. La transcription de IVE&
donna Wobé.
Les populations guéré et wobé ne constituent donc qu'une seule et même ethnie, l'ethnie Wè.
Cependant, pour respecter l'usage établi depuis plus d'un demi-siècle maintenant, et consacré par les
populations elles-mêmes, nous conserverons, pour la clarté de l'exposé, la distinction Guéré-Wobé, tout
en ne lui accordant, répétons-le, qu'une valeur formelle.
2. Problèmes de méthodologie
Les données dont fait état ce travail sont le résultat d'une enquête systématique menée de février
à juillet 1967 auprès de tous les groupements guéré et wobé.
Notre démarche fut au départ purement empirique. Elle consistait, en un premier temps à reconstituer.
à partir des unités cantonales actuelles, les grands équilibres traditionnels : confédérations guerrières
et groupements de guerre. Puis, en un second temps. à disséquer ces ensembles pour voir de quoi ils étaient
constitués. Cette première approche nous permit de faire l'inventaire exact de tous les groupements existant
en pays Wè avant la pénétration coloniale.
Sur la base de ce canevas nous avons procédé ensuite à une investigation plus qualitative, selon
une technique d'enquête combinant les méthodes extensive et intensive :
- extensive : nous avons systématiquement passé en revue la totalité des groupements guéré et
wobé (51 exactement) et chercher à recouper, chaque fois que cela nous semblait indispensable, à l'intérieur
d'un même groupement, les informations obtenues dans un village par celles 'recueillies dans un autre ;
cela nous amena à travailler dans plus de 80 villages ;
- intensive : notre enquête, tout en restant semi-directive, cherchait à répondre à des questions
précises : nature exacte du groupement (clan, fédération d'alliance, groupement de guerre, etc.), origine
(mythique ou réelle) du (ou des ) fondateur (s) (recueil des mythes d'émergence, des traditions historiques
relatives aux migrations et déplacements successifs), profondeur généalogique séparant l'ancêtre-fondateur
de ses descendants actuels, origine de l'interdit totémique (qui met souvent en lumière une alliance privilégiée
entre tel et tel groupement), rapports avec les autochtones (quand il y en avait, intégration ou refoulement)
ou avec les voisins (coopération : échanges commerciaux (marché) et matrimoniaux, ou opposition :
guerre), structure actuelle du groupement (détermination, chaque fois que cela fut possible, des unités
exogamiques), impact sur le cadre géographique traditionnel de la mise en place. au moment de la pénétration
coloniale. des unités administratives nouvelles.
L'information recueillie est, comme nous le verrons, loin d'être de qualité égale. Systématiquement
tronquée par certains groupements cherchant à légitimer une position qui n'était pas la leur avant l'arrivée
des Européens, elle souffre auprès d'autres, où les K vieux » commencent à être rares, de la réelle ignorance
qu'a la présente génération d'âge mûr des choses du passé. Cette mauvaise connaissance de la tradition
est d'autant plus alarmante qu'elle traduit souvent le refus systématique des couches les plus instruites
de la population de perpétuer - ne serait-ce que par le souvenir - des coutumes estimées barbares, K honteuses
1) et non conformes aux impératifs de la modernisation. A cette dernière attitude s'ajoute souvent
LA MISE EN PLACE DES POPULATIONS GUÉRÉ ET WOBÉ (lrc PARTIE) 9
aussi l'incompréhension de l'intérêt qu'il y a à reconstituer et à fixer des données ou des événements qui
apparemment ne présentent plus aucune utilité et, qui plus est, risquent quelquefois même de ressusciter
de vieilles inimitiés.
Aussi ce travail ne revendique-t-il pas un caractère d'achèvement. Dans l'état actuel de son élaboration
il ne peut et ne doit être considéré que comme un répertoire, tentant de fixer un certain nombre de
données de la tradition orale et, partant, de constituer des éléments d'cc archives sociales », au sens où
l'entend Marcel Griaule. En tant que tel, il est susceptible de servir d'outil de travail à la fois à I'administrateur
chargé de prendre des décisions sur le plan local, et souvent (du moins dans les premiers temps)
peu au fait de la réalité sociale de la circonscription dont il a la charge, et au planificateur, soucieux d'agir,
quel que soit le domaine de son intervention future, sur un fond humain homogène.
CHAPITRE PREMIER - SOCIÉTÉ PRÉCOLONIALE ET ÉQUILIBRES TRADITIONNELS
Pour une meilleure intelligence de ce travail, il nous a semblé utile d'exposer tout d'abord brièvement
les grands traits de l'organisation sociale traditionnelle des populations guéré et wobé. NOUS examinerons
ensuite, à travers l'étude détaillée des d@érents groupements, comment s'est efJéctuée la mise en place du
peuplement, avant de tenter une interprétation historique des données obtenues et un essai de chronologie.

II. LA MISE EN PLACE DU PEUPLEMENT
Pour avoir une idée exacte de la mise en place du peuplement il nous a semblé indispensable de
procéder, en un premier temps, à l'étude détaillée de l'implantation géographique de chacun des groupements,
avant de tenter, en un second temps, un essai de synthèse et de chronologie.
A. IMPLANTATION GÉOGRAPHIQUE : ÉTUDE DE DÉTAIL
1" Les populations dites Wobé
L'actuel pays wobé était jadis occupé par trois groupes de populations formant des confédérations
guerrières @~XI-&), entités géographiquement et politiquement assez nettement définies : les Gbéon,
les Zoho et les Baon.
Ces confédérations guerrières se divisaient elles-mêmes en groupements de guerre ou d'alliance
(MM), le groupement de guerre ou d'alliance pouvant être soit issu d'une fédération de clans, soit constitué
par un clan isolé, démographiquement suffisamment étoffé pour se sentir la force de préserver son intégrité.
Les trois grandes confédérations guerrières comprenaient les groupements suivants :
- Gbéon : Gbéan, Kouao, Tao, Tebao, Kirou, Glao ;
- Zoho : Péomé, Pléhou, Saho, Nidrou ;
- Baon : Sémien, Wéhia, Koua, Blaon.
A côté de ces grandes unités il convient de faire une place à part à un micro-groupement, les Zouagnon,
d'origine étrangère (Toura), occupant une parcelle du territoire des Zoho et jouissant d'un statut
tout à fait particulier.
A. LES GBÉON
- gbe6 : littéralement (( ceux qui marchent ensemble X, par extension les (( alliés » ;
- La confédération des Gbéon comprenait les groupements Gbéan, Kouao, Tao, Tebao, Kit-ou
et Glao. La tradition orale reconnaît à l'ensemble de ces groupements (à l'exception des Kouao) une
origine mythique similaire : le ciel, la lune, les airs ;
LA MISE EN PLACE DES POPULATIONS GUÉRÉ ET WOBÉ (,= PARTIE) 17
- Limite de confédération
--- Umlta de qroupsmenf
= Route principale
- Route rccondaire
l Chef-lieu de Sous-pr$feCfure
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FIG. 4. - Les populations wobé.
18 Alfred SCHWAR? Z
- Les groupements de l'ancienne confédération guerrière des Gbéon constituent incontestablement
des clans (rke), sauf en ce qui concerne les Kouao ; mais leur essor démographique a été tel qu'ils ne
forment actuellement plus des entités exogamiques. Le système des interdits continue par contre à opérer
au niveau de chacun des clans (existence d'un ou de plusieurs totems communs par clan).
1. Les Gbéan
- Le fondateur du clan, Gbéan, serait descendu du ciel en compagnie d'une femme, dans une
cuvette en cuivre suspendue au bout d'une chaîne. Parallèlement à cet ancêtre mythique, la tradition orale
reconnaît l'existence d'un ancêtre réel, Gbéhi, qui serait venu du village de Guiri (actuel pays Zibiao) à
la suite d'une querelle de famille.
- Les Gbéan ont un totem commun, le margouillat (glo), mais se subdivisent actuellement en
sept lignages exogamiques qui ont chacun un totem secondaire : Siho, Séhidi, Gahon, Trinho, Kwiao,
Débèokon, Zéraokon.
2. Les Kouao
- Le terme exact est koao : « ceux qui ne tiennent pas rancoeur » (ko = pardonner ; a = préposition
qui marque la qualité ; o = les hommes ; koao = littéralement CCle s hommes du pardon 1)).
- Les Kouao parlent de deux ancêtres, qu'il nous fut impossible de situer avec précision :
San, qui serait venu du pays Zaha (région de Guiglo) s'installer avec sa famille, à la suite
d'un palabre, sur le territoire actuel ;
Basséhi-Blogba, qui serait venu à la chasse depuis le pays Néao et se serait installé ici.
- Selon toute vraisemblance les Kouao sont issus de l'amalgame de plusieurs groupements lignagers
hétérogènes (pas de totem commun). Ils se subdivisent actuellement en quatre entités exogamiques :
Sahouo et Tohou, Fléandi et Séandi.
3. Les Tao
- L'ancêtre des Tao, Tao-Kohogui, est descendu de la lune sur un corbeau (WC). La tradition orale
veut que le fils de Tao-Kohogui, Gbèkpé-Toho (littéralement CCG bè, le guerrier suprême ») ait fait la guerre
dans la région de Séguéla. Sont-ils .venus en renfort aux habitants de la région de Séguéla (les mE-bac,
terme générique qui signifie « les étrangers éloignés » et qui désigne les CCD ioula »), attaqués par ceux de
Vavoua, comme la tradition le prétend ? Ou auraient-ils été refoulés par ces mêmes Baon d'un premier
habitat qui se serait situé dans la région de Séguéla! en savane, vers leur territoire actuel, en marge de la
forêt (1) ?
- Le clan Tao se subdivise, à l'heure actuelle, en sept lignages exogamiques : Séakpéiadi, Klouéalon,
Mahalognon, Kohouédi, Kahaglon, Séhadi, Kéhidi. Tous respectent un seul et même totem : le corbeau
(wE). A cet interdit commun, les Séhadi et les Kéhidi ajoutent celui du poisson (simi).
4. Les Tebao
- Tebao : sens du terme perdu.
- La tradition orale relative à l'implantation de l'ancêtre des Tebao, Ganharz, sur le territoire
(1) Le chef de l'actuel canton Tao, Sous-Préfecture de Kouibli, nous a signalé l'existence d'un groupement Tao dans
la Sous-Préfecture de Séguéla, près de Sifié.
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actuel, est légèrement confuse. L'origine de l'ancêtre est à la fois mythique et réelle : Ganhon serait venu
du pays Zérabaon par les airs, en quête de zones plus giboyeuses, et serait descendu au-dessus du territoire
actuel par une chaîne.
- Les Tebao respectent tous un même totem, le buffle (Chi), et se subdivisent à l'heure actuelle en
quatre lignages exogamiques : Yésédi, Taodi, Gousonhi, Yaodi.
5. Les Kirou
- L'ancêtre des Kirou (de leur vrai nom Guiré), Ya-Zéo, est descendu du ciel par une chaîne, en
compagnie d'un boa.
- Les Kirou se subdivisent en deux lignages majeurs, exogamiques :
les Guiré-Wéa, ou Guiré du Haut ;
les Guiré-Zoinhi, ou Guiré du Bas.
- En plus du boa (mli), les Kirou ont adopté comme totem l'ensemble de l'espèce des serpents.
6. Les Glao
- L'ancêtre S&i est descendu du ciel par une chaîne sur la montagne Glao (près du village de
Kiriao). Selon les Glao tous les Gbéon seraient descendus du ciel par la même chaîne. Mais le premier à
arriver sur terre aurait été Séhi, l'ancêtre des Glao, ce qui aurait conféré à ces derniers une suprématie politique
sur l'ensemble des Gbéon, suprématie d'ailleurs contestée par les autres groupements.
- Les Glao respectent tous un même totem, le chien (gb&), et se répartissent actuellement en trois
lignages majeurs, qui ont adopté chacun un totem secondaire. Deux de ces lignages majeurs sont exogarniques
: Zouao et Irowé ; le troisième, Kiriao, se subdivise en quatre lignages mineurs, exogamiques :
Siaibli, Kiriaklognon, Klèo, Zouao.
B. Les Zoho
Il ne nous a pas été possible de retrouver la signification du terme Zoho, dont le sens semble perdu.
La confédération comprend les groupements Péomé, Pléhou, Nidrou et Saho. Tous, à l'exception des
Saho et d'une fraction des Pléhou, revendiquent une origine mythique commune, et seraient descendus du
ciel par une chaîne. Les Saho sont originaires de la rive gauche de la Sassandra, et leur implantation est
postérieure à celle de leurs alliés de la confédération Zoho.
1. Les Péomé
- Leur véritable nom est pE-o : littéralement « les hommes du lézard X. La désinence me fut ajoutée
à leur nom par leurs voisins de l'Est, les Dan (me, plus exactement ITZËs, ignifie en Dan, « homme 1)) ;
p&o-me, « les hommes de p.50 )), fut transcrit par Péomé.
- L'ancêtre des Péomé, Kloukéné, est descendu du ciel par une chaîne à Ziondrou (où la chaîne
a été conservée), en compagnie d'une femme, Gnihinon-Diéhi, et d'un frère aîné, Blatahi. Quoique revendiquant
une même origine et continuant à respecter un totem commun, pE (le lézard), le clan est actuellement
fragmenté en cinq lignages exogamiques (Pinho, Kliègnon, Gniningnon, Koao et Koho). Ces lignages,
en plus de l'interdit commun, ont adopté, au moment de la segmentation, des totems (( secondaires »
nouveaux.
- L'adoption du lézard comme totem des Péomé s'est faite dans les circonstances suivantes : à la
mort de l'ancêtre Kloukéné, la famille décide d'enterrer le gendre du défunt, Fahé, avec le cadavre du vieux.
20 Alfred SCHWARTZ
Fahé s'en va tirer son « bangui » (vin de palme) dans la forêt en pleurant. Chemin faisant il rencontre un
lézard qui lui demande : « Pourquoi pleures-tu ? » Fahé expose son malheur au reptile. Le jour de l'enterrement
arrive. On appele Fahé pour le sacrince quand surgit le lézard qui arri$te les opérations et dit :
« On ne doit jamais enterrer deux personnes dans la même tombe. Si Fahé a commis le mal, faites-le travailler
pour ceux qui sont venus présenter leurs condoléances à la famille du défunt H. Fahé fut sauvé, et
l'animal-bienfaiteur adopté comme totem.
2. Les Pléhou
- La littérature orale attribue au terme Pléhou une double origine :
Pléhou viendrait de pie, courir, et signifierait littéralement (( les hommes qui s'enfuient N.
L'ancêtre des Pléhou, Tiogbé-Bé-Tien, est descendu du ciel, à Gbadrou, suivi à trois jours d'intervalle
par un aigle porteur du feu. Or les Péomé, qui sont venus sur terre après les Pléhou, n'avaient
pas le feu. Ils décidèrent donc de le voler aux Pléhou, et envoyèrent dans ce but un enfant à Gbadrou.
L'enfant est surpris, frappé et tué. En plus, les Pléhou organisent une expédition punitive contre les
Péomé, assiègent la montagne sur laquelle est érigée Ziondrou et commencent à creuser des galeries
sous le village. Les Péomé, effrayés, demandent l'aide des Kouao (Gbéon), qui pour débloquer
la montagne arrosent les Pléhou de leurs flèches et les font fuir ;
le terme Pléhou ne serait qu'une onomatopée et imiterait le bruit de quelqu'un qui tombe
dans un trou. Ce terme leur 'aurait été donné par leurs voisins, et était une mise en garde qui signifiait
: (( Attention, si vous vous attaquez à ces gens-là, vous allez tomber dans trou (plehu) 1).
- Mais le terme par lequel le premier noyau Pléhou se désignait lui-même était Boo, ce qui signifie
(( ceux qui n'ont jamais peur N. Aux Boo se sont ajoutés deux autres groupes de populations chassés par
la guerre :
les Sékouahinon, originaires du pays Toura ;
les Koulazoignon, originaires de la région de Touba.
Les Pléhou comprennent donc, à l'heure actuelle, trois groupements claniques, se subdivisant au
total en huit lignages exogamiques :
Boo : Blao, Kouyo, Douandi ;
Koulazoignon : Tahakloignon, Koulazoignon ;
Sékouahinon : Sroadi, Gloadi, Douindi.
- Les Pléhou ont deux totems communs : la chèvre (gbalo) et l'aigle (tihi) :
la chèvre n'est pas leur totem originel, mais a été adopté à la suite d'un échange de totems
avec leurs voisins Zoin (Dan). Les Zoin, qui avaient pour totem la chèvre, reçurent un jour des
étrangers qui étaient cordonniers. Afin de pouvoir tuer la chèvre et se procurer du cuir, les Zoin
proposèrent aux Pléhou un échange de totems : c'est ainsi que le totem des Pléhou, le poisson
(simi) passa aux Zoin, et le totem des Zoin la chèvre (gbalo) fut adopté par les Pléhou (1) ;
l'ancêtre des Boo, Tiogbé, était descendu du ciel sans le feu. Ce fut l'aigle qui le lui amena sur
terre trois jours après son arrivée.
(1) L'échange de totems faisait partie des services courants que des groupements voisins étaient tenus de se rendre
sous peine de risquer de déclencher, en cas de refus, un conflit armé.
LA MISE EN PLACE DES POPULATIONS GUÉRÉ ET WOBÉ (IIe PARTIE) 21
3. Les Nihou
- Nidrou : ni = eau ; dru = tête ; littéralement CCla tête de l'eau )), c'est-à-dire la CCso urce )). Le
premier village des Nidrou, Blébo, était situé près de la source d'un CCm arigot ».
- L'ancêtre des Nidrou, Ziréko, est descendu du ciel par une chaîne, près de Ziondrou, en pays
Péomé. Les Nidrou auraient quitté le pays Péomé pour leur territoire actuel par manque de terre.
- Les Nidrou sont actuellement répartis en six lignages exogamiques ayant chacun leur propre
totem : Kouaou, Kohou, Zouahou, Kémèhon, Blouo, Wonho.
4. Les Saho
- Les Saho sont originaires de la région de Vavoua (actuel canton Niédéboua) et auraient franchi
le Sassandra à la recherche de nouveaux territoires de chasse.
- Saho : deux versions pour expliquer l'origine et le sens du terme :
saho serait la contraction de l'expression ma-boo : saa = attacher, lier ; boo = premier et
véritable nom des Pléhou, auprès desquels les Saho s'installèrent au terme de leur migration, et
qui leur offrirent le feu. En signe de reconnaissance les nouveaux arrivants restèrent toujours étroitement
solidaires des Boo, et furent appelés par leurs voisins saa-boo : CCce ux qui sont attachés
aux Boo 1) ; saa-boo devint saho ;
les futurs Saho étaient venus à la chasse avec une panthère (( qui attrapait tout à la volée »
(saho : saa = attraper à la volée ; 0 = celui, celle qui).
- Les Boo et les Saho marchèrent ensemble jusqu'au jour où la panthère des Saho vint à mourir.
Les Boo s'en emparèrent pour la manger. Les Saho, mécontentso se séparèrent de leurs bienfaiteurs.
- Les Saho revendiquent tous une origine commune et reconnaissent un même ancêtre, dont les
fils, Maéné et Tao, furent à l'origine du déplacement. Le groupement Saho de l'ancienne confédération
des Zoho est actuellement divisé en deux lignages majeurs : Maénédi, exogamique, et Taodi, comprenant
quatre lignages mineurs : Flindi, Gbominhi, Trugbohodi, Baodi, exogamiques.
- Les Saho continuent à respecter, en plus de leur propre totem, la panthère (dgi), le totem des
BOO, qui leur avaient offert l'hospitalité, la chèvre (gbalo).
C. LES BAON
- Baon signifie CCél oigné, lointain )), et par extension CCét ranger ». Le terme Baon est utilisé d'une
façon générale en pays guéré et wobé pour désigner les CCD ioula )), CCge ns venus de loin 1).
- Les Baon sont en effet venus CCd e derrière le Sassandra H. Sur les quatre groupements que forme
la confédération, trois sont originaires de Séguéla et, au départ, ne différaient en rien des Malinké de cette
région : Sémien, Koua et Blaon. Le quatrième, le groupement Wéhia ou Saho, est venu de la région de
Vavoua.
- Les Sémien, Koua et Blaon se considèrent eux-mêmes à la fois comme Malinké et comme
Wobé, et parlent indifféremment les deux langues. Aux yeux des Gbéon et des Zoho ils sont cependant
davantage perçus comme Malinké que comme Wobé. II en est de même des Wéhia, qui sont toujours considérés
comme des étrangers.
- II convient cependant de noter que l'unité des Baon est plus le résultat de la perception qu'ont
des groupements Sémien. Koua, Blaon et Wéhia les autres Wobé, que l'expression d'une véritable cohésion
interne. II semble en effet que l'alliance entre les groupements Baon n'ait jamais opéré avec autant d'efficacité
que celle entre les groupements Gbéon ou Zoho.
27 Alfred SCHWARTZ
1. Les Sémien
- Sémien, plus exactement Sémian : littéralement « personne n'a vu la savane )) (se = marque la
négation : ie = voir ; mi5 = savane).
La migration des Sémien s'est faite en deux temps :
ler tenzps : une querelle éclate à l'intérieur du clan DOSSO, établi alors dans la région de
Séguéla. Une fraction du clan décide de partir et, accompagnée de membres de trois autres clans
qui avaient pris parti pour elle, Soumaoro, Doumbia et Diomandé, s'en va vers l'Ouest et s'installe
sur une montagne appelée Tkentrodrou, à proximité du pays Toura. Les habitants de cette
montagne s'appelerent Tkentrodr'ozzgno?z (les hommes de Tkentrodrou) ;
2e temps : les Tkentrodrougnon, qui avaient espéré trouver la paix sur cette nouvelle terre,
ne tardèrent pas à entrer en conflit avec les Toura. Un chasseur découvre alors un jour cette « savane
que personne n'a vue )) (se-ie-mi6), où ils seraient à l'abri des Toura. Les Tkentrodrougnon
décident le déplacement vers le Sud et s'installent sur se-ie-mia.
- Les Sémien sont toujours constitués à l'heure actuelle par les quatre clans qui avaient quitté
ensemble la région de Séguéla et qui forment autant d'unités exogamiques : Dosso, Soumaoro, Doumbia
et Diomandé.
2. Les Koua
- Les Koua sont originaires de la région de Séguéla. Leur arrivée est postérieure à celle des Sémien
et des Wéhia, dont ils ont traversé le territoire pour s'établir sur leur terre actuelle. Mais la raison de leur
migration est inconnue.
- Le premier village fut établi sous l'arbre kus (ako), dont il porta le nom. kzl& devint Koua, terme
qui fut appliqué par l'administration coloniale pour désigner l'ensemble du groupement.
- Les Koua seraient tous issus de deux couples d'ancêtres : Békon et Fassé, qui ont donné naissance
aux Selon. Les Dolon forment à l'heure actuelle un lignage majeur exogamique, subdivisé en deux
lignages mineurs : Oulion et Séhidignon ; les Selon constituent un lignage majeur, composé de deux
lignages mineurs exogamiques : Selon et Kouaon. Le système des interdits est commun au niveau de
chaque lignage majeur.
3. Les Blaon
Les Blaon, qui forment un tout petit village, Tiébly (294 habitants), sont également originaires de
la région de Séguéla, et leur migration serait contemporaine de celle des Sémien.
4. Les Wéhia ozl Saho
- Les Wéhia ou Saho sont originaires, comme les Saho de la confédération Zoho, de la région de
Vavoua. Ils se disent apparentés à ces derniers, mais ne revendiquent ni origine commune, ni totem commun.
- L'appellation Wélzia leur aurait été donnée par l'administration coloniale pour les distinguer des
Saho du canton Péomé, appellation par laquelle les désignaient les Sémien et qui vient du terme Malinké
xxio, (( faire palabre N. Wéhia signifie donc littéralement (( ceux qui font palabre 1).
- Les Wéhia se subdivisent à l'heure actuelle en trois lignages exogamiques, ayant chacun leur
propre totem : Bahiékon, Bilékon, Minkon.
Même si les Sémien, les Koua et les Blaon continuent à parler le Dioula au même titre que le Wobé,
LA MISE EN PLACE DES POPULATIONS GUÉRÉ ET WOBÉ (ire PARTIE) 23
l'ensemble de la confédération des Baon nous paraît cependant culturellement plus proche des Wobé que
des Malinké de Séguéla. En effet, et ceci nous semble fondamental, l'Islam n'a encore que très peu pénétré
en pays Baon. Par ailleurs les échanges matrimoniaux se font davantage avec les Gbéon et les Zoho qu'avec
les populations de derrière le Sassandra. Les Baon disent eux-mêmes qu'ils sont Wobé d'adoption.
D. LES ZOUAGNON
- Le micro-groupement des Zouagnon (actuellement 781 personnes, et jadis un seul village,
Zouatta) occupe une place tout à fait à part aux confins des grandes confédérations guerrières wobé. Les
Zouagnon sont originaires du pays toura et quittèrent leur montagne, sous la conduite de l'aïeul Guinhin,
à la suite d'un conflit de famille, pour venir s'installer sur une parcelle du territoire des Pléhou (Zoho).
Zouagnon signifie les K hommes sans parti )), c'est-à-dire neutres. La terre de Zoua constituait en effet une
terre de refuge, d'asile politique, sur laquelle aucun droit de poursuite n'était possible et dont le sol ne
pouvait être foulé par quiconque nourrissait une intention belliqueuse.
- Ce statut particulier ne fut jamais enfreint, et les Zouagnon, au gré des hostilités, accordèrent le
droit d'asile aux R réfugiés » les plus divers. Gens de la paix, ils ne participèrent jamais à aucun conflit.
- Le village-mère des Zouagnon, Zouatta 1 (il existe, depuis quelques années, un second village,
Zouatta II, issu de rivalités politiques qui opposèrent fraction jeune et fraction vieille de la population) est
édit% sur un rocher, dans une zone de collines et reproduit fidèlement la structure de l'habitat toura traditionnel
(cases rondes à toit conique très pointu).
- Les Zouagnon, en reconnaissance envers les Pléhou qui leur offrirent l'hospitalité, adoptèrent
leur principal totem : la chèvre (gbalo). Ils se divisent actuellement en deux lignages exogamiques : Guinhindjé
et Glouzonhi.
- Nulle part ailleurs, en pays wobé ou guéré, nous n'avons retrouvé les traces d'une quelconque
autre terre d'asile, au statut analogue à celui de la terre de Zoua.
Si nous examinons les rapports que les trois confédérations entretenaient entre elles il est possible
de conclure à une certaine unité du pays actuellement appelé wobé. Mais cette conclusion sera restrictive,
et nous verrons plus loin pourquoi. Les éléments de cette unité nous paraissent pouvoir être saisis à trois
niveaux :
- au niveau des échanges matrimoniaux ;
- au niveau des échanges économiques (marché) ;
- au niveau des alliances militaires.
1. Les échanges matrimoniaux
Les différentes unités exogamiques des trois confédérations ont de tous temps librement échangé
des femmes entre elles. Les relations de voisinage ont, bien sûr, toujours joué. Mais il n'a jamais existé ni
mariage préférentiel, ni interdit de quelque nature que ce fût.
Par contre il était rare que les Gbéon, les Zoho ou les Baon prennent femme chez leurs voisins de
l'Est (Gouro et Malinké de Séguéla), du Nord (Toura) et de 1'Guest (Toura et Dan). De tels mariages
n'étaient pas formellement prohibés, et pouvaient le cas échéant se produire, mais ils étaient vivement
déconseillés.
24 Alfred SCHWARTZ
2. Les échanges économiques
Il existait, dans la société pré-coloniale, au niveau du village-chef de chacun des groupements, un
marché, dont la fréquentation dépassait à la fois le cadre du groupement et celui de la confédération. Certains
marchés, en période de paix, étendaient leur influence jusqu'aux populations traditionnellement considérées
comme ennemies : ainsi arrivait-il que celui de Sémien attirât, en plus des Baon, des Gbéon et des
Zoho, des Toura et des Gouro,. Mais c'était là cependant un événement qui ne se produisait que rarement.
D'une manière générale, le marché, qui se tenait régulièrement tous les sept jours, cimentait donc
les liens d'alliance entre groupements et servait de catalyseur dans les rapports entre confédérations.
3. Le jeu des alliances militaires
Les traditions orales sont unanimes : il n'y eut jamais de véritable guerre entre Gbéon, Zoho et
Baon. Si les différentes confédérations se sont constituées, c'est moins dans le but de se mesurer entre elles
que de faire face à un ennemi extérieur : Dan, Toura, Malinké, Gouro. Chaque conflit ne mettait, bien
sûr, pas en branle les trois confédérations simultanément. Mais il arrivait qu'en cas de « coup dur 1) l'alliance
jouât au niveau de l'ensemble des groupements wobé.
Il existe donc, certes, une unité du pays wobé, mais - et ceci justifie notre restriction - cette unité
s'inscrit dans un cadre géographique beaucoup plus vaste, qui inclut, au Sud, la confédération Zibiao (peutêtre
même celle des Zagné). Il y a même un terme par lequel les Gbéon, Zoho, Baon et Zibiao sont désignés
par leurs voisins du Sud : Kwéaon, c'est-à-dire (( les hommes du Haut )) (par opposition à Zoirzhignon,
(( les hommes du Bas ))). Les Zibiao - et même les Zagné - étaient d'ailleurs inclus dans l'alliance que nous
évoquons ci-dessus. Nous verrons en effet que rien ne différenciait les Zibiao des Gbéon, Zoho et Baon.
Ceci tout simplement pour rappeler ce que nous avons déjà souligné dans l'introduction de ce travail
: que la distinction entre Guéré et Wobé est arbitraire, qu'elle n'est que le fait d'une conjoncture
historique particulière, et ne repose sur aucune donnée réelle.
2" Les populations dites Guéré
Nous distinguerons ici successivement :
- les populations entre Sassandra et Kô-Nzo ;
- les populations entre Nzo et Cavally ;
- les populations entre Cavally et Nuon.
A priori il semblerait que dans une société de type guerrier le réseau hydrographique, en traçant
des limites facilement défendables, eût dû jouer un rôle prépondérant dans la mise en place du peuplement.
Ce ne fut cependant pas toujours le cas en pays guéré. Aussi trouverons-nous à l'intérieur de zones naturelles
apparemment homogènes des groupements humains entretenant des rapports qui furent pratiquement
en permanence d'hostilité (Zagna-Zagné par exemple). A l'inverse, certaines populations « homogènes ))
étaient établies sur les deux rives d'un même cours d'eau (Zaha, Nidrou).
Cependant il convient de faire mention ici de l'information, qui nous fut fournie une fois seulement
au cours de notre enquête (l), et selon laquelle les Guéré étaient autrefois divisés en trois entités bien
distinctes, déterminées par le réseau hydrographique :
- Les Douébahon. entre Sassandra et Kô-Nzo (due-ba5 : « les hommes de l'éléphant » ; de là
(1) Par le chef du canton Zérabaon de Blolequin.
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Limite de confédération
Limite de groupement
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Route recondoire
Chef-lieu de Sous-préfecture
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FIG. 5. - Les populations guéré entre Ko-Nzo et Sassandra
26 Alfred SCHWARTZ
viendrait aussi l'appellation Duékoué (en réalité due-kg : « sur le dos de l'éléphant D), centre qui, après
la pénétration coloniale. commandera cette zone ;
- les Sabahon, entre Nzo et Cavally (Sabahon : Sa serait une contraction de Saho, population
de la rive gauche du Sassandra - actuel pays Niédéboua - d'où seraient partis les groupements établis
entre Nzo et Cavallyj ;
- les Tchienbahon, entre Nuon et Cavally (dont les Guéré de Toulépleu ne forment que la fraction
la plus septentrionale, les groupements les plus importants étant établis dans la région de Tchien, au Libéria).
L'unité dont fait état cette classification entre groupements d'une même entité n'est malheureusement
que partiellement confirmée par les données de la tradition orale relatives aux rapports que ces
groupements entretenaient entre eux.
Le critère géographique que nous utilisons ici, et qui reprend cette classification en trois entités,
ne doit donc avoir, à notre sens, qu'une valeur de repère. Il n'est qu'une commodité pour tenter de mettre
un peu de clarté dans l'imbroglio du peuplement guéré ancien.
Les populations entre Sassandva et Kô-Nzo
Nous étudierons ici successivement :
- les confédérations guerrières Zibiao, Zagné et Zagna ;
- le groupement de guerre Zaha, implanté de part et d'autre du Nzo, mais à tradition plus proche
de celle de leurs voisins du Nord-Est que de celle de leurs voisins de l'Ouest.
A. LES ZIBIAO
Plusieurs versions expliquent l'origine du terme Zibiao :
version du clan Zibiao : les Zibiao seraient les descendants de l'ancêtre Zibiai ;
version du clan Glaon : Zibiao vient de zibo, « gagner le plus », par extension « vaincre » ;
Zibiao = ceux qui ont gagné le plus , les vainqueurs ;
version des Zagna (ennemis des Zibiao) : Zibiao vient de zi-bi-a-bli : littéralement (( ils
laissent les fusils pour se cacher », par extension (( poltrons, peureux ».
- La confedération guerrière des Zibiao se divise en deux fédérations distinctes : les Zibiao-Kwéa
(Zibiao du haut) et les Zibiao-Zoinhi (Zibiao du bas) ;
les Zibiao-Kwéa comprennent les groupements Zibiao et Tahouaké (actuel canton Tahouaké)
les Zibiao-Zoinhi comprennent les groupements Niaho, Goléo, Glao, Séhou et Tiéméo
(actuel canton Zibiao).
- Les différents groupements Zibiao, à l'exception des Séhou, revendiquent une origine commune.
Mais la tradition orale est confuse à ce sujet. Plusieurs noms d'ancêtre sont avancés :
Gohou (par les Zibiao) ;
Bahan (par les Glaon) ;
Zibiai (par les Tahouaké et une fraction des Zibiao).
LA MISE EN PLACE DES POPULATIONS GUÉRÉ ET WOBÉ (Ire PARTIE) 27
Nous reproduisons ici l'hypothèse la plus communément admise, et qui ferait de Zibiai le père
de tous les Zibiao. Zibiai, fils de Bahou-Djé, serait venu du Sud, à la suite d'une guerre, d'un village que
nos informateurs situent en pays Tchien, au Libéria. 11 aurait créé le premier village des Zibiao entre les
montagnes Séa et Man, près de l'actuel Diéouzon. Deux raisons sont alléguées pour expliquer à partir
delà la dispersion des enfants de Zibiai :
la guerre : b&too (K guerre qui est venue de loin H), qui aurait été à l'origine du départ des
Tahouaké ;
le système des interdits, qui était devenu trop lourd, et qui a entraîné des querelles entre
les familles. II existait en effet quatre totems que l'ensemble des Zibiao était tenu de respecter :
l interdiction de manger le mouton ;
l interdiction de piler le piment (il faut l'écraser) ;
l interdiction de casser les noix de palmiste la nuit ;
l interdiction de manger le coeur de palmier.
Les enfants de Zibiai s'en vont donc créer chacun leur propre village. La segmentation, qui a donné
naissance aux différents groupements Zibiao, se serait faite de la manière suivante :
- Cette hypothèse nous paraît cependant peu vraisemblable :
tout d'abord elle est contestée par certains groupements Zibiao eux-mêmes ;
en second lieu il ne reste aucune trace de totem commun, qui pourrait corroborer l'idée
d'une communauté d'origine ;
en troisième lieu la présence d'un groupement Séhou, dont nous trouvons des représentants
un peu partout à travers les pays guéré et wobé, et qui forme une communauté bien à part, nous
paraît absolument incompatible avec la version qui fait des Séhou les descendants de Sé, fils de
Zibiai ;
il nous semble, en dernier lieu, que le souci de présenter un univers traditionnel cohérent
n'ait pas été étranger aux préoccupations de nos informateurs.
- Pour avoir une idée plus précise des différentes communautés de la confédération Zibiao, il
convient donc d'en examiner les traditions orales séparément.
1. Les Zibiao-Kwéa
a. Les Zibiao
- 11 est vraisemblable que le groupement Zibiao proprement dit se soit constitué autour des
descendants de Gohou, qui seraient demeurés auprès de l'ancêtre Zibiai.
28 Alfred SCHWARTZ
- Les Zibiao continuent à respecter les quatre totems qui auraient été à l'origine de la dispersion
des enfants de Zibiai (interdiction de manger le mouton, de piler le piment, de casser les noix de palmiste
la nuit, de manger le coeur de palmier). Leur terre est considérée comme le berceau de l'ensemble des
Zibiao.
b. Les Tahouaké
- Au cours d'une guerre avec les Zagna, qui remontèrent le Sassandra pour attaquer les Zibiao
par le Nord, ces derniers se réfugièrent au plus épais de la forêt, vers l'Est. A la fin des hostilités, Tahou,
fils de Zibiai, s'y installe définitivement tandis que les autres retournèrent dans leurs villages.
- Deux versions expliquent l'origine du terme :
Tahou-a-ké : Tahou = fils de Zibiai : ke exprime l'idée de profondeur, de fond de quelque
chose (ici de fond de la forêt) : Tahou-a-ké peut se rendre par K le coin de Tahou )) ;
tahn-a-ke : tahu = sorte de panier en forme de cône ; ke = fond ; littéralement (( le fond
du panier », c'est-à-dire le fond de la forêt ; par extension « ceux qui habitent au plus profond de
la forêt 9.
2. Les Zibiao-Zoinhi
a. Les Niaho et les Galéo
- Les Niaho et les Goléo ont toujours (( marché ensemble » et respectent un même totem : le
serpent (SE). Ils revendiquent comme ancêtre Bahou-Djé, mais ne font pas état de Zibiai. Bahou-Djé serait
descendu du ciel sur la montagne Soho, près de Diéou.
- Bahou-Djé a eu deux fils : Nian et Golé. Selon une autre version, la femme de l'ancêtre aurait
mis au monde des triplés : Nian, Golé et un serpent (le serpent vert, appelé gole). Nian a donné naissance
aux Niaho, Golé aux Goléo.
b. Les Glaon
La tradition orale fait état de deux versions quant à l'origine des Glaon :
- Les Glaon seraient les descendants de Zibo-Dohou, un des fils de l'ancêtre Bahan, père de tous
les Zibiao, qui partit du Libéria avec sa femme et ses enfants, à la suite d'une guerre. Les enfants de Zibo-
Dohou s'installèrent sur la montagne Guéla (près de Zéo) et furent appelés Gudaon « les hommes de
Guéla », qui devint Glaon ;
- les Glaon seraient issus de l'union libre d'une fille Zibiao? Da-Siha, et d'un homme dan. Da-
Siha était la fille de Tabahon, premier fils de l'ancêtre Gohou (et non plus Bahan). Les enfants de Da-Siha
étaient donc les neveux utérins des Zibiao. Or il existe deux termes dans la langue guéré pour désigner
l'enfant de la soeur : cljuga et gla. De là l'appellation Glaon, « les hommes qui sont les neveux ». Cette
origine expliquerait également leur position géographqiue sur la « frontière )) dan, les &g6 servant en
effet habituellement de « tampon » en cas de relations conflictuelles entre deux groupes.
LA MISE EN PLACE DES POPULATIONS GUÉRÉ ET WOBÉ (1,' PARTIE) 29
c. Les Séhou
- Selon le chef du groupement lui-même, les Séhou n'ont aucun lien de parenté avec les Zibiao.
Ils seraient venus également du Libéria, mais séparément.
- La version Zibiao de l'origine des Séhou est double :
Les Séhou seraient, comme nous l'avons déjà signalé plus haut, les descendants de Sé, fils
de Zibiai ;
Les Séhou seraient issus de relations incestueuses qu'une fille de Zibiai, Séhou-Gnihinon,
eut avec un de ses frères.
rl. Les Tièméo
- Tièméo : déformation de tks-meo : K six clans N.
- Zibiai aurait eu deux fils : Tjan et Guirou, qui au moment de la dispersion des Zibiao se sont
installés côte-à-côte. Tjan et Guirou eurent chacun trois fils, qui fondèrent les six familles (tks-nzeo).
- Les Tiéméo se subdivisent actuellement en deux clans exogamiques : Tjan et Guirou.
La tradition orale relative à l'origine des groupements Zibiao est, comme nous venons de le voir,
particulièrement embrouillée et confuse. Encore avons-nous essayé de la clarifier au maximum en présentant
successivement les différentes versions. Une chose semble cependant certaine : le sens de la migration,
qui se fit du sud vers le nord.
Les Zibiao étaient les alliés à la fois des Gbéon, Zoho et Baon et des Zagné. En cas d'attaquesurprise
des Zagna ils avaient l'habitude de se réfugier auprès des Gbéon. Ils faisaient la guerre aux Dan
et aux Zagna. Ils prenaient de préférence leurs femmes chez leurs alliés, mais également chez les Bilou,
le groupement Zagna le plus septentrional.
B. LES ZAGNÉ
- Zagné : 2-a = guerrier ; pe = écraser, anéantir totalement (sous-entendu l'ennemi) ; Zagné
signifie donc littéralement CCle s guerriers qui anéantissent totalement (l'ennemi N).
- Les Zagné portaient également un surnom .* ~5~5, littéralement CCqu i brûle comme le piment N.
- La confédération guerrière des Zagné comprenait les cinq groupements suivants : Sébahon,
Tkènien, Vahon-Djimahon, Gbowon, Debohon.
1. Les Sébakorz
- L'ancêtre Ba a été mis sur la montagne Séhi (près de Guéhiébli) par Dieu. Son fils Batahou
vécut sur cette montagne, en compagnie de sa femme Gouléon, qui était la fille d'un pangolin (J@.
Sébahon signifie K les hommes de Séhi )).
30 Alfred SCHWARTZ
- Les Sébahon, qui forment donc à l'origine un clan, continuent à respecter une série de totems
communs : le boeuf (bli), le daman (ula), la chauve-soutis (gbe), le chien (gbc) et le pangolin (~8). Ils se
divisaient autrefois en six lignages exogamiques qui marchaient deux par deux : Gbohouokon-Guirakon ;
Gnao-Mehon ; Pouékon-Gouléakon. Il s'y est ajouté ultérieurement un segment de lignage issu de l'éclatement,
à la suite d'un palabre, du lignage Winlo. du clan Debohon.
2. Les Tkènien
- Tkènien : « les quatre clans N. Les Tkènien formaient autrefois une fédération de quatre clans,
marchant deux par deux : Bahon-Kpahon, Sroé-Béhikon. Mais ce schéma n'est actuellement plus respecté.
A la suite d'un palabre entre Sroé et Béhikon, le masque des Bahon invite les Sroé à venir s'installer
auprès d'eux, (( pour apaiser leur coeur N. II s'effectua alors un renversement des alliances : depuis, les
Sroé marchent avec les Bahon, les Kpahon avec les Béhikon.
a. Les Bahon-Kpahon
- les Bahon : Gnon-Sua (Dieu) a mis sur terre deux hommes, Kéhi et Déhé. Ceux-ci errent à
travers la forêt sans savoir où se fixer. Dieu décide alors de venir à leur secours et de leur servir de guide.
Il traîne derrière lui une fourche. A l'endroit où celle-ci s'accroche, il demande à Kéhi de fonder son village.
Kéhi crée Yaglo et donne naissance aux Bahon : contraction de bu-ze-k6 : littéralement (( les descendants
de la fourche qui s'est accrochée N ;
- les Kpahon : Dieu continue sa route avec Déhé, vers l'Est. A l'endroit où la fourche s'accroche
pour la seconde fois, Déhé crée Diahouin, et donne naissance aux Kpaon ;
- les Bahon se divisent actuellement en deux lignages majeurs : Tahakon et Zékon ; les Kpahon
en quatre lignages, dont trois exogamiques et un subdivisé en quatre segments de lignage exogamiques :
Kpahonzohi : Goulowékon, Gahakon, Zéglokon, Bohokon ;
Mahékon ;
Zéaokon ;
Délékon.
b. Les Sroé-Béhikon
- les Sroé : l'ancêtre Ziaou est parti du pays Zaha (Guiglo), pour vendre des colas sur le marché
de Zohodrou, marché qui rassemblait Dan, Dioula et Guéré, en pays Bilou (Zagna). Pour mettre fin à
un perpétuel va-et-vient, Ziaou finit par s'installer à proximité de Zohodrou, et y poursuivit la culture de
la cola ;
- les Béhikon : ils auraient de tous temps occupé leur territoire actuel ;
- les Sroé se divisent actuellement en deux lignages exogamiques : Toho et Gouléakon ; les
Béhikon en quatre lignages exogamiques : Tohoglokon, Douloukon, Bahinkon, Tahakon.
3. Les Vahon- Djimahon
Les Vahon-Djimahon forment un groupement de guerre issu de la fédération de deux groupements
d'alliance, le groupement Vahon et le groupement Djimahon.
a. Les Vahon
- Vahon : déformation de ~00 : les lutteurs.
- Les Vahon comprennent quatre clans (tkc) exogamiques : Séhou, Ziaon, Vèzaha, qui auraient
toujours été sur place ; Gao, dont l'ancêtre, Séhi-Ba, serait parti du groupement Tao (pays wobé).
LA MISE EN PLACE DES POPULATIONS GUÉRÉ ET WOBÉ (ire PARTIE) 31
6. Les Djimahon
- Djimahon : dgi, panthère ; ma& les hommes ; littéralement « les hommes de la panthère ~1,
par extension « braves )).
- Les Djimahon sont constitués de deux clans exogamiques :
le clan Djimahon proprement dit, qui se dit autochtone et dont l'ancêtre Siahé serait sorti
de la source du marigot Ba-Tohou (qui passe à proximité de l'actuel village de Sibabli) ;
le clan Saho, dont l'ancêtre Gueïba serait venu du pays Niédéboua? derrière le Sassandra,
à la suite d'une guerre (mêmes Saho que ceux du pays wobé) ; les Saho ont été accueillis par les
Djimahon et, depuis, ont toujours vécu à leurs côtés.
4. Les Gbowoll
- Les Gbowon sont tous issus du groupement Gbéan, de la confédération des Gbéon (pays wobé).
Leur implantation s'est faite en deux étapes :
à la suite d'une querelle de famille Oula-Gbohou quitte le pays Gbéon et s'en va créer un
nouveau village vers le Sud, près d'une montagne à laquelle il donne son nom (Gbowon, les hommes
de Gbohou) ; Oula-Gbohou a quatre enfants, qui donnent naissance, selon le schéma ci-dessous,
aux quatre lignages majeurs qui forment quatre des villages Gbowon actuels.
Un autre groupement quitte le pays Gbéon un peu plus tard, et vient s'installer au voisinage
des descendants de Oula-Gbohou. Ce groupement, appelé Wanhan, littéralement (( ceux qui ont
quitté )) (leur tk&), constitue actuellement le village de Nidrou.
- Les quatre tks Gbowon et le groupement Wanhan sont divisés en lignages (gnu) exogamiques :
Dibéokon : Gaoulékon, Fléo ;
Ziakon : Béakon (Gbohoukon, Baziadikon, Bléhékon) ;
Ziaokon (Zroédaidi, Gahadi) ;
Souokon-Séradi ;
Vlèhè : Guémonlékon (Gouléakon, Douokon, Dahankon) ;
Yéhékon (Ganhonkon, Sahoukon) ;
Guirou : Ziokon, Irèo ;
Wanhan : Gbéo, Djokon, Gahiakon.
5. Les Debohon (ou Winlo)
- Les Debohon sont officiellement appelés, par l'administration, Winlo. Les Winlo ne constituent
en réalité qu'un lignage majeur du clan Debohon.
- Les Debohon reconnaissent tous un seul ancêtre, Koua, qui serait sorti d'un éclair, avec sa
femme Taha, et descendu sur la montagne Ziba (près de Toazéo). Koua eut pour fils Debohi, qui donna
son nom à l'ensemble du clan (Debohon, les hommes de Debohi).
32 Alfred SCHWARTZ
- Le clan Debohon est composé actuellement de deux lignages majeurs, Danhon et Winlo, qui
se subdivisent de la manière suivante :
Danlzon : 3 lignages mineurs (gw) dont deux exogamiques, et le troisième formé par trois
segments de lignage (nzEi) exogamiques : Bahiékon, Zagnakon, Toho (Zouaékon, Gaokon, Gbaékon).
Wido : 10 lignages mineurs, marchant deux par deux, et répartis en :
. 3 groupes de deux lignages exogamiques :
Némahikon - Taho
Zroékon - Némaobokon
Gnankon - Dohokon
l 3 lignages et deux segments de lignage exogamiques :
Dionkon - Troakon
Zouao - Gboho (2 segments exogamiques : Glandi et l'ensemble Gbaodi, Taodi,
Kéhidi).
- Schématiquement la segmentation s'est faite de la manière suivante :
La confédération guerrière des Zagné entretenait des liens amicaux étroits avec les populations
du Nord, Zibiao et Gbéon notamment. La tradition orale ne fait état d'aucun conflit avec ces derniers.
Les rapports des Zagné avec leurs autres voisins (Zagna au Nord-Ouest et Sud, qui formaient un
véritable étau autour des Zagné, et Niaboua à l'Est) furent moins heureux. Cela ne les empêcha cependant
pas d'échanger des femmes avec les Zagna, mais jamais, disent nos informateurs, avec les Niaboua.
II existait, avant la pénétration coloniale, trois marchés sur le territoire des Zagné : l'un à Troya
(Vahon-Djimahon), l'autre à Yaglo (Tkènien) et le troisième à Zéo (actuellement Toazéo, Debohon).
Occasionnellement des échanges avaient lieu aussi sur les bords du Sassandra entre Zagné et Niaboua
(les Zagné servant d'intermédiaires entre populations du Nord et du Nord-Ouest, Dan et Dioula, fournisseurs
de pagnes, de sel et d'huile, et les Niaboua, qui se procuraient plus au Sud, fusils de traite et poudre).
C. LES ZAGNA
- Zagna : za, guerrier ; pu, méchant ; littéralement (( les guerriers méchants .u.
- La confédération guerrière des Zagna comprenait autrefois les groupements suivants : Bilou,
Guéo, Tièmesson, Séhou, Tiètan, Blaon.
LA MISE EN PLACE DES POPULATIONS GUÉRÉ ET WOBÉ (1,. PARTIE) 33
1. Les Mort
- Bilou : deux significations :
« ceux qui sont nombreux ensemble )), par extension (( les alliés )) ;
(( là où tout le monde peut s'installer », par extension K accueillant x
- Les Bilou constituent un groupement de guerre formé de deux fédérations d'alliance (Irébéo et
Djibo - Gbébo) et d'un clan isolé (Guinaonj.
a. La fédération d'alliance Trébéo
- Irébéo : ire, voir ; be, supporter ; o, les hommes : littéralement (( les hommes qui voient et
supportent 1). La fédération d'alliance Irébéo comprend 4 clans dont 3 sont exogames :
les Guinglokon (« les hommes des cornes de gazelle H) : l'ancêtre Baba est sorti de la rivière
Séao (actuel canton Tahouaké). Mais chassé par la guerre il se déplace vers le Sud-Ouest et s'installe
sur la montagne Gbao (près de Duékoué). Là, il vit entouré de panthères, qui le protègent et
le ravitaillent en viande. Les Guinglokon assumaient les charges rituelles de l'ensemble des Bilou,
en tant que premiers occupants de la terre. Ils étaient propriétaires des K cornes »Y utilisées par les
hérauts pour rétablir la paix, et jouaient de ce fait un rôle de médiateurs dans les conflits ;
les Zouédi : l'ancêtre des Zouédi, Bu-Zoué, est originaire de la confédération Zoho (Wobé).
La coutume veut qu'un vieillard, à partir d'un certain âge, ne puisse plus s'éloigner de son village
et y soit littéralement prisonnier. Ba-Zoué, qui se sentait encore valide, pour échapper à cette contrainte,
décida de fuir, et s'en fut s'installer avec ses enfants vers le Sud, auprès de Baba, l'ancêtre
des Guinglokon ;
les Goadi : l'ancêtre Goa est venu à la chasse depuis le pays niaboua. 11 se perd dans la forêt,
trouve refuge auprès de Bazoué, l'ancêtre des Zouédi, et décide de rester ;
les Bakon : les Bakon sont originaires du pays Zagné, qu'ils ont quitté à la suite d'une guerre.
Ils se divisent actuellement en trois lignages exogamiques : Gahakon, Zahokon, Gouléakon.
b. Le clan Guinaon
- L'ancêtre du clan Guinaon, Guina, originaire du pays Zérabaon, est venu à la chasse, avec ses
chiens, sur la rive gauche du Nzo. II trouve Baba sur la montagne Gbao, mais la coexistence entre les panthères
de Baba et les chiens de Guina s'avérant difficile, ce dernier s'installa sur la montagne Dohou, après
avoir pris pour femme une fille de Baba. Guina eut six fils, qui donnèrent naissance à six patrilignages,
selon le schéma suivant :
- Ces six patrilignages comprennent actuellement les unités exogamiques suivantes :
Yadi : Gliwokon, Zouaïkon ;
Douédi : Nouèon, Zimobo ;
Winbahikon : Monhidi, Douamaiandi, Guémaiandi ;
Alfred SCHWARTZ
Dohékinkon : Gouakon (Saondi, Gouakon), Ouakon, Ziaékon ;
Magnandi : Yasrodi (Yédi, Yasrodi), Koladaodi ;
Blaon (cf ci-après groupement Blaon).
c. La fédération d'alliance Djibo-Gbébo
- Alors que les Djibo se considèrent comme autochtones, les Gbébo, clan guerrier, seraient venus
de l'extérieur, pour porter assistance et protection aux premiers.
- Les Djibo-Gbébo, qui constituent une fédération d'alliance, occupent actuellement un seul
village* Gbéoué. Chaque clan se subdivise en deux lignages exogamiques :
Djibo : Gazonkon, Béhouakon ;
Gbébo : Gouléakon, Vlèhèkon.
2. Les Guéo
- Le terme Guéo est une contraction de Gué-toho (ge-too) : littéralement « traverser la guerre 1)
(ge, traverser ; too, guerre). Les Guéo, qui ne revendiquent pas un ancêtre commun, situent leur point de
départ sur la montagne Man, dans le Nord de l'actuel canton Tahouaké. Ils en sont partis chassés par une
guerre, appelée batoo (littéralement (( la guerre des hommes qui viennent de loin », par extension des
Dioula). Le nom de ge-too évoque cette fuite à travers les lignes des éléments ennemis qui entouraient la
montagne.
- Les Guéo, dans leur exode, se dirigent vers le Sud-Ouest et s'installent sur la montagne Séhi,
en compagnie des Sébahon, qui leur lancent des cordes afin qu'ils puissent escalader les rochers (le bloc
granitique qui porte encore maintenant le nom de Séhi est en effet d'un accès difficile). Mais les agresseurs,
qui avaient retrouvé leurs traces, se présentèrent bientôt aux pieds de la « montagne » et commencèrent à
creuser des galeries dans ses flancs, en vue de faire basculer le rocher. La tradition veut qu'une partie du
bloc granitique s'effondra effectivement, mais pour écraser l'assaillant, tandis que les Guéo et les Sébahon
quittaient les lieux par une autre arète.
- C'est au cours de ce nouvel exode que le groupement Guéo, jusqu'alors uni, éclate et se fragmente
en quatre branches :
a. Les Diblaguéo : di, lance ; bla, planter, piquer ; littéralement (( les Guéo qui ont planté la lance )).
Les Diblaguéo s'installèrent à quelques kilomètres au Nord-Ouest de la montagne S&i, et constituent le
groupement Guéo actuel. Ils sont formés de deux clans, Blao et Bohi, qui se subdivisent de la manière
suivante :
- Blao : trois lignages majeurs
Tahakon (Gahankon, Glohokon, Tahaglokon-Gouléakon (éteint), lignages mineurs exogamiques)
;
Zilokon (Iaidi-Kpahadi) ;
Gbéonkon (Séasaoundi, Baguéhidi, Sibayaondi) ;
- Bohi : trois lignages majeurs exogamiques : Zibabo, Oulakon, Manglokon.
b. Les Bèguéo : b&, palmier-raphia J littéralement « les Guéo du palmier-raphia )) ; selon la tradition
orale des Guéo actuels les Bèguéo auraient franchi le Nzo et trouvèrent de l'autre côté de la rivière
des peuplements importants de palmiers-raphia (dont la sève donne le vin de palme). Ils s'y installèrent et
constitueraient actuellement le groupement Gbéo du canton Zérabaon de la Sous-Préfecture de Blolequin
LA MISE EN PLACE DES POPULATIONS GUÉRÉ ET WOBÉ (Pc PARTIE) 35
(cf ci-après : Les populations entre Nzo et Cavally). Cette version n'est pas confirmée par les Gbéo euxmêmes,
mais l'itinéraire décrit correspond assez bien à celui emprunté par les Zérabaon (dont les Gbéo
font partie) au cours de la migration qui amena ces derniers de la rive gauche du Sassandra sur leur territoire
actuel.
c. Les Saguéo : les Saguéo, après l'éclatement des Guéo, se seraient dirigés plein Nord, et auraient
donné naissance à l'actuel groupement Saho du canton Péomé de la Sous-Préfecture de Fakobli (cf cidessus
: Les populations dites Wobé). Mais cette version est en contradiction totale avec les renseignements
recueillis auprès des Saho eux-mêmes.
d. Les Baguéo : les Baguéo (K les Guéo faiseurs de pièges ») s'enfoncèrent bien plus profondément
encore que les Bèguéo dans la forêt, vers le Sud-Ouest, et seraient les ancêtres des Boo (cf ci-dessous : Les
populations entre Nzo et Cavally) de la Sous-Préfecture de Blolequin. Mais la tradition orale des Boo n'a
de commun avec celle des Baguéo que le sens général de l'itinéraire emprunté par les deux groupements
au cours de leur migration.
La tradition orale recueillie auprès de l'actuel groupement Guéo pose un certain nombre de problèmes
:
- les trois autres groupements Guéo ont-ils réellement existé, et l'éclatement s'est-il effectivement
réalisé selon le schéma décrit ci-dessus ? Si tel est le cas, pourquoi les K aboutissants )) ne font-ils pas état
de ces données ?
- Les mythes d'émergence font partir l'ensemble des Guéo de. l'Est, mais du canton Tahouaké,
donc de la rive droite du Sassandra. Or les traditions recueillies auprès des Gbéo, Saho et Boo sont unanimes
pour situer le point de départ de leurs ancêtres (( derrière » le Sassandra, donc de la rive gauche du
fleuve. S'agit-il néanmoins d'une même migration ? L'imprécision des traditions orales, les altérations
toponymiques successives, l'omission du détail au profit de lignes globales (ici le sens général de la migration)
pourraient étayer l'échafaudage d'une telle hypothèse. Dans ces conditions l'implantation des Guéo
serait à rattacher à la migration des Zérabaon (cf ci-dessous). Ceci expliquerait par ailleurs l'alliance
étroite qu'ils ont toujours entretenue avec les Bilou, dont la majorité des clans revendiquent une origine
Zérabaon.
3. Les Tièmesson
- Tièmesson : K les sept clans )).
- Les Tièmesson n'ont en réalité jamais formé que quatre clans, mais se répartissaient autrefois
en sept villages. Actuellement ils sont tous regroupés à Diourouzon (depuis 1920).
- Les quatre clans Tièmesson sont :
Nièho : l'ancêtre Bahou-Gnanklé est sorti de la montagne Doué (à l'Est de Diourouzon) ;
Dguinaho : l'ancêtre Dguiré est sorti du marigot Zébè (à proximité de l'actuel village) ;
Ziègbéo : l'ancêtre Gboho-Kwè est sorti du marigot Dienpinhou (près du village également) ;
Tilao : l'ancêtre Bolo, originaire du groupement Glaon (Zibiao), aurait quitté son pays en
quête d'eaux plus poissonneuses.
- Les quatre tke se subdivisent en gnzc, exogamiques.
4. Les S&ou
- Les Séhou seraient originaires du Mont Nia, situé au Nord de l'actuel village de Zéaglo (pays
Zérabaon). C'est Douéhi, fils de l'ancêtre Nia, qui quitta le village de son père à la recherche d'une forêt
36 Alfred SCHWARTZ
plus giboyeuse. Il décida de s'installer au voisinage des Tièmesson, qui lui offrirent l'hospitalité, et fonda le
village de Douéhiglo. Il y fut rejoint plus tard par Goulia, petit-fils de Nia.
- Avant l'arrivée des Européens les Séhou formaient quatre villages. Ils sont actuellement tous
regroupés à Guiglo et se subdivisent en deux lignages exogamiques : Irodi et Ziandi.
5. Les Tiètan
- Tiètan : « les trois clans ». Il s'agit des clans Youkon, Glao et Gbao.
- Les Youkon et les Glao revendiquent en réalité un même ancêtre, Gnzahon, et seraient issus de
l'union de cet aïeul avec deux femmes différentes :
Les Youkon et les Glao peuvent donc être considérés comme les lignages majeurs d'un même
clan.
- Youkon, Glao et Gbao, qui vivaient autrefois près du Nzo, sont actuellement regroupés à Fengolo.
a. Youkon et Glao
- L'ancêtre Gmahon a été mis sur terre par Dieu, près de l'actuel village de Fengolo.
- Les Youkon sont exogamiques, mais les Glao se subdivisent actuellement en trois lignages exogames
: Guinglokon, Blaondi, Tahidi.
b. Gbao
-- L'ancêtre Yo est sorti de la source du marigot Wotiéhi, qui part du rocher Ba-Séba, à l'Ouest
de Fengolo.
- Les Gbao se divisent actuellement en deux lignages majeurs, dont l'un. le lignage Guilakon,
est exogame, et l'autre, le lignage Gbao, se subdivise en quatre lignages mineurs exogames : Némakon,
Zohokon, Dibiakon, Bahiékon.
6. Les Blaorz
- Blaon : CCle s hommes de Bla ».
- Les Blaon revendiquent un même ancêtre, Péhou. Péhou aurait comme père Zé-Dibo, qui
serait sorti de la montagne Bla (près de Guitrozon). Zé-Dibo eut deux fils : Péhou et Bléo. Péhou eut
quatre enfants, qui donnèrent naissance aux Blaon, alors que Bléo serait l'ancêtre des Bilou (ce qui est
contesté par ces derniers).
LA MISE EN PLACE DES POPULATIONS GUÉRÉ ET WO BÉ (1" PARTIE) 37
- Les données recueillies auprès du groupement Bilou sont légèrement divergentes de cette version.
Selon nos informateurs Bilou, Péhou est effectivement l'ancêtre des Blaon, mais il serait le sixième
fils de Guina, fondateur du clan des Guinaon, et non de Zé-Dibo. Il existe en effet des liens d'alliance privilégiée
entre Guinaon et Blaon. Pendant très longtemps les deux groupements n'ont pas échangé de femmes
entre eux, et ceci pour une double raison : le lien étroit de parenté qui existe entre les cinq patrilignages
Guinaon et les Blaon d'une part ; le désir de continuer à entretenir une union étroite entre les deux communautés
d'autre part, en écartant la principale source de conflit de la société traditionnelle, l'échange
matrimonial. Par ailleurs. toujours selon les Bilou, le terme Blaon viendrait de bZaza5 (bla, piège ; za,
attraper) : (( les hommes qui attrapent beaucoup de gibier dans leurs pièges 1).
- Les Blaon constituent neuf lignages majeurs (dont sept exogames), qui ont toujours marché
deux par deux, sauf un :
Gbao-Bliékon (les Gbao se subdivisent en 4 lignages mineurs exogamiques : Sahonkon,
Blokon, Winkon, Ziokon) ;
Drouékon - Tahakon ;
Dguimakon - Zouao ;
Dgimaékon-Guiého (les Dguimaékon se subdivisent en deux lignages exogamiques : Ziakon
et Glooukon) ;
Kpahon.
:I:: k*
Les Zagna étaient entourés de tous côtés de groupements ennemis : au Nord les Zibiao et les Dan,
à l'Est les Zagné, au Sud les Zaha et les Doo, à l'Ouest les Zérabaon. Nous n'avons relevé que d'occasionnelles
alliances entre les Blaon et une fraction des Zaha, les Blao. Les Zagna étaient don.c particulièrement
isolés. Certains de nos informateurs athrment même que les différents groupements ne se mariaient qu'à
l'intérieur de la confédération. D'autres prétendent que seul un mariage contracté à l'intérieur du pays
Zagna était considéré comme un bon mariage.
Ce sont les Guéo, groupement Zagna le plus septentrional et limitrophe des Dan, qui auraient
donné leur nom à l'ensemble des Guéré (voir introduction).
11 existait. à l'époque précoloniale, un marché pour l'ensemble des Zagna, à Zohodrou, en pays
Bilou. Ce marché était fréquenté non seulement par les groupements Zagna, mais également par les Dan,
Dioula, Zibiao, Zérabaon, Zagné et Zaha.
D. LES ZAHA
- Les Zaha (actuel canton Zaké-Blao de Guiglo) se désignaient eux-mêmes par le terme Zaha,
mais étaient appelés par leurs voisins zake :
Zaha : za, envahir, prendre la place de, par extension (( guerriers )) ;
Zaké : zaa-tks, littéralement « prendre la place du clan, occuper le village du vaincu )), par
extension (( les conquérants ».
- Les Zaha revendiquent un même ancêtre, Baho-Djé, qui aurait été mis sur leur terre actuelle
par Dieu, Il est probable qu'en réalité Bao-Djé ne soit le père que du seul clan Baokon, le groupement
38 Alfred SCHWARTZ
Zaha étant né de la nécessité qu'imposait le danger permanent de guerre à des clans voisins mais dispersés
de s'unir. Ces clans (tks) étaient au nombre de douze et marchaient deux par deux :
Némaon - Blao
Bahokon-Zouokon
Nohon - Irakon
Séhou - Zibokon
Zérakon - Bouakon
Gniao - Douoho.
- Chaque tks formait autrefois un village, et la terre était appropriée par groupe de deux clans.
- Les Zaha prétendent n'avoir jamais eu aucun allié. Ils faisaient la guerre aux Zagna, Zérabaon,
Fléo-Niaho, Doo, Kouzié. Cela ne les empêchait pas d'échanger des femmes avec ces mêmes groupements.

Cah. O.R.S.T.O.M., sér. Sci. hum., vol. VI, no 1-1969.
LA MISE EN PLACE
DES POPULATIONS GUÉRÉ ET WOBÉ
Essai d'interprétation historique des données
de la tradition orale
Deuxième Partie*
PAR
Alfred SCHWARTZ**
SOMMAIRE
LA MISE EN PLACE DU PEUPLEMENT (mite)
10 Les populations entre Nzo et Cavally
A. LES ZÉRABAON
1. Les clans du canton Zérabaon de Bangolo
2. Les clans du canton Zérabaon de Blolequin
3. Le canton Glokouion
4. Le canton Zahon
5. Le canton Goum-Blao
6. Les cantons Néao-Blao Nord et Néao-Blao Sud
7. Le groupe Guémalé
B. LES Boo
C. LES GBAO
D. LES FLÉo-NIAHO
E. LES DAHO-DOO
* La première partie de cette étude a paru dans le no 4, vol. V, 1968 des Cahiers ORSTOM, Série Sciences Humaines,
p. 3 à 38.
** Section Sciences Humaines ORSTOM, 24 rue Bayard, Paris-8e.
Alfred SCHWARTZ
2O Les populations entre Cavally et Nuon
A. LES NIDROU
B. LES BÉHOUA
C. LES WELAO
D. LES MAO
E. LES WINLAO
Conclusion : Le probléme des Séhou ou Séhinou
B. Essai de synthèse et de chronologie
1. Les noyaux « autochtones »
2. Les migrations à longue distance ou externes
3. Les migrations internes
Conclusion : Principales phases du peuplement et chronologie
1. Mise en place des populations se disant autochtones
2. Mise en place des populations se disant originaires du Nord
3. Mise en place des populations se disant originaires de l'Est
Chapitre II. IMPACT COLONIAL ET ÉQUILIBRES NOUVEAUX
1. LES GRANDES ÉTAPES DE LA CONQUÊTE MILITAIRE
II. L'IMPACT COLONIAL
A. Le découpage administratif
B. Les déplacements et regroupements de populations
C. L'éclatement des cadres anciens
m LESÉQUILIBKE~ NOUVEAUX
A. Groupements anciens et organisation administrative actuelle du pays wobé
B. Groupements anciens et organisation administrative actuelle du pays guéré
Appetzdice : ETAT ACTUEL DES POPULATIONS GUÉRÉ ET WOBÉ
LA MISE EN PLACE DES POPULATIONS GUÉRÉ ET WOBÉ (FIN)
Les populations entre Nzo et Caually
Ces populations comprennent :
- la confédération guerrière des Zérabaon :
- les groupements de guerre Boo, Gbao, Fléo-Niaho et Daho-Doo.
A. LES %UFtAON
- La dénomination exacte est Zéabaon. Le terme Zéabaon est composé de : zea, diviser, séparer ;
Bu, nom du guerrier qui dirigeait le groupement lors de son implantation sur les bords du Nzo ; 0, les
hommes.
Deux explications quant au sens :
(( Ba sépare les hommes )), au sens de « rend la justice » ;
« les hommes de Ba qui se sont séparés ».
- C'est ce second sens qui est le plus vraisemblable. En effet les populations qui porteront plus
tard le nom de Zéabaon, sont parties de derrière le Sassandra, d'une montagne appelée Gnan (ou Gnahia),
à la suite d'une guerre (guerre de Glao-Séhi, qui serait venu du pays dioula). Certains informateurs situent
le point de départ dans la région de Vavoua, en pays Saho, et disent que leurs ancêtres portaient le nom de
Sabahon avant de s'appeler Zéabaon. D'autres situent Ieur pays d'origine beaucoup plus à l'Est. Quoi
qu'il en soit, les futurs Zéabaon franchirent le Sassandra sous la conduite d'un chef de guerre, Ba, et continuèrent
leur marche vers l'Ouest jusqu'au Nzo. Là ils se heurtèrent à la rivière en crue, qu'ils ne purent
traverser qu'avec le concours d'un groupe de pangolins géants (ZZIE)q, ui de leurs corps firent un pont. Parvenu
sur la rive droite du N~O, Ba créa le premier village des Zéabaon : Zéaglo. Mais il y eut bientôt dissension
entre les différents groupements qui, dans le cadre d'un même village, étaient tenus au respect de
trop d'interdits. Zéaglo éclata et la population se dispersa. L'origine de l'appellation Zéabaon serait liée
à cet événement (« les hommes de Ba dispersés »). Il est probable que le nom de Zéaglo (« le village des
dispersés X) ne fut donné au village qu'après son éclatement également.
- Certains informateurs revendiquent un même ancêtre pour l'ensemble des Zéabaon : Doué.
Mais cette donnée est contestée par la plupart des groupements.
- Les Zéabaon formaient à l'origine vingt tk&, qui marchaient deux par deux, et avaient chacun
leur propre totem :
Baébo - Guiriaon
Gbéo - Gbéou
Zahon - Gouého
Gouléo - Kouliaon
Néao - Blao
Tkinho - Gao
Kouahi - Djao
Kao - Ouaho
Téo - Kourou
Tja - Gbao
Après l'éclatement de Zéaglo ces clans connurent des fortunes diverses. Les uns, par suite de leur
faible essor démographique, s'intégrèrent à des unités plus vastes. D'autres, qui se développèrent plus
heureusement, affirmèrent leur personnalité, tout en préservant leur intégrité. Parmi ceux qui émergèrent
6 Alfred SCHWARTZ
on peut citer les Gbéou, les Gao, les Tkinho, les Kouahi-Djao, les Goulée-KouIiaon, les Zahon, les Blao,
les Néao et les Kao (Guémalé). Le groupe. des cinq premiers- formerale futur canton Zérabaon de Bangolo.
Les cinq--&vants: formeront cinq cantons,- dont. ti pour les Gouléo-Kouliaon (Glokouion), un pour les
Zahon, un pourles Blao'(Goum;Blao) et deux pour les Néao (Néao-Blao Nord et Néao-Blao Sud). Sur
lesneuf qui restent, troisessaimeront en pays dan (Ouaho, Téo et Kourou) et les six autres (Béabo-Guiriaon;
Gbéo, Gouého, Tja-Gbao) constitueront le canton Zérabaon de Blolequin.
- Par souci de clarté nous présenterons ces différentes unités en fonction des entités administratives
qu'elles forment à l'heure actuelle. Nous étudierons donc ici, contrairement à ce que nous avons fait
jusqu'à présent, chacun de ces clans à l'intérieur du cadre cantonal que leur a assigné le colonisateur.
1. Les clans du canton Zérabaon de Bangolo
Il s'agit des groupes Gbéou, Tkinho-Gao et Kouahi-Djao.
a - Les Gbéou
- Gbéou : « ceux qui sont ensemble )). Les Gbéou furent les premiers à franchir le Nzo. Ils constituaient
l'élément de tête des Zérabaon.
- La tradition orale veut que ce soient les Gbéou qui aient chassé de Zéaglo les autres clans, ces
derniers refusant de continuer à respecter plus longtemps le pangolin géant (ZUE)q, ui leur avait permis de
traverser la rivière, comme totem. Les Gbéou habitent toujours les bords du Nzo.
-. Les Gb6ou.s.e. répartissent actuellement en neuf lignages majeurs, dont certains sont exoga-,' :;'.
miques, et d'autres suhdis$&err,Iignages mineurs exogamiques-Les neuf lignages soxt : GaI&kon,: Djao; ' -.-
Iroao (deux lignages mineurs), Bakon (~n~-lignage~~euIs)rlLe,Iik~n~(qu~t~e-li~~gès-mineurs), Loho,
Méo, Kouéon (trois lignages mineurs) et Kpao.
b - Les Tkinho-Gao
- Tkinho : les hommes &hés (tkE, se fâcher), après s'être fait chasser par les Gbéou ;
- Gao : nom d'une montagne.
- Les Tkinho comprennent actuellement trois lignages majeurs : Zéréo (subdivisé en deux lignages
mineurs exogamiques), Tlcinho et Tahakon.
- Les Gao se répartissent également en trois lignages majeurs : Dguiraon (subdivisé en deux
lignages mineurs), Gouého (deux lignages mineurs) et Kamaékon.
c - Les Kouahi-Djao
- Les Kouahi-Djao sont plus communément désignés à l'heure actuelle par le seul terme de Djao
(les hommes de Dja).
- Les Kouahi comprennent cinq lignages majeurs exogamiques : Guièo, Mahokon, Loho, Gnahikon.
Monhinkon ; les Djao deux : Djakon et Glakon.
A ces clans il faut ajouter également une communauté Séhou, établie auprès des Tkinho-Gao à Zou
et Phing-Béoua et des Kouahi-Djao à Babli et Zéregbo.
2. Les clans du canton Zérabaon de Blolequin
- Après l'éclatement de Zéaglo, la majorité des clans s'enfoncèrent dans la forêt vers le Sud et le
Sud-Ouest. tout en continuant à entretenir d'étroits rapports avec les populations restées au Nord. Quand
en 1926 l'administration coloniale décida la création de la route Guiglo-Toulépleu (dont les travaux ne
LA MISE EN PLACE DES POPULATIONS GUÉRÉ ET WOBÉ (FIN) 1
commencèrent effectivement qu'en 1929) on amena de force les groupements les plus méridionaux sur les
bords de la future voie de communication. Seuls les villages les plus septentrionaux furent épargnés. C'est
ce qui explique le (( no man's land » actuel entre le canton Zérabaon de Bangolo et les cantons Zérabaon de
Guiglo et de Blolequin. Ce vide n'est d'ailleurs qu'apparent, les campements de culture des Zérabaon du
Sud s'étendant très loin vers le Nord.
- C'est ainsi que naquit le canton Zérabaon de Blolequin du regroupement des clans Baébo-Guiriaon,
Gbéo, Gouého et Tja-Gbao. Chacun de ces clans s'est fragmenté en une infinité de lignages, majeurs
et mineurs, qui constituent à l'heure actuelle une véritàble mosaïque d'unités exogamiques.
3. Le canton Glokouion
- Le canton Glokouion est issu du groupe de clans Goulée-Kouliaon. Une mauvaise transcription
transforma Gouléo-Kouliaon en Glokouion.
- Les Gouléo-Kouliaon mettent en doute leur appartenance à l'entité Zérabaon. Leurs ancêtres
seraient partis de la savane du Nord, en même temps que les Zaha, Fléo-Niaho, Nidrou et Boo. Toutes
ces populations auraient formé ensemble un premier village, Bangolo, à l'embouchure du Nzo avec le
Sassandra. C'est à partir de Bang010 que s'effectua leur dispersion. Les Goulée-Kouliaon s'en furent créer
leur premier village à Djo-Yaï (entre Béoua et Glopaoudy).
a - Le clan Gouléo
- Goulée : contraction de gode-too, littéralement « ceux qui ne reculent pas à la guerre » (gule,
continuer à avancer ; too, guerre).
. . - Les Gouléo descendent tous d'un même ancêtre, Guéo, et respectent un totem commun, la
gaielle (dr.z). Ils se divisent en huit lignages majeurs exogames, marchant deux par deux :
Déhi - Bliao
Diaon - Zéakon
Douokon - Zohokon
Goao - Bahiakon
II s'y ajoute, en plus, une communauté Séhinou, qui descendrait d'une femme Séhinou venue de
derrière le Nzo.
b - Le clan Kouliaon
- Kouliaon : onomatopée qui traduit le bruit du piment qu'on écrase. Les Kouliaon étaient des
guerriers et avaient l'habitude d'écraser leurs ennemis.
- Les Kouliaon revendiquent un même ancêtre, Djé, mais les sept lignages qu'ils forment ont
tous des totems différents. Trois de ces lignages ont comme aïeule une femme Saho, enlevée au cours d'une
guerre, et forment un groupe qui a toujours été uni : Niakon, Monokon, Ouliakon, tous trois exogamiques.
Les quatre autres lignages, également exogamiques et marchant deux par deux, sont :
Zri - Nionaon
Gao - Ziaon.
8 Alfred SCHWARTZ
4. Le canton Zahon
- Après l'éclatement de Zéaglo les Zahon s'installèrent sur les bords du Scia (affluent du N~O).
Les Gbéou, avec qui ils restèrent en étroite relation (les Gbéou étant chasseurs et les Zahon pêcheurs),
les appelèrent za-ung, onomatopée traduisant le bruit de celui qui se jette à l'eau (une des techniques traditionnelles
de pêche consistait en effet à appâter le poisson avec une boulette de manioc contenant du tabac
en poudre. Le pêcheur se déplace le long de la rivière, repère le poisson et lance la boulette. Le poisson la
happe, disparaît dans les profondeurs, mais remonte très vite en surface, étourdi par le tabac. 11 suffit alors
au pêcheur de se jeter à l'eau et de ramener sa prise sur la berge) ; za-zmg est devenu Zahon.
- Les Zahon descendent tous d'un même ancêtre, Gaha, mais n'ont pas un totem unique. Ils se
subdivisent en deux groupes de lignages :
les Trolézahon (ou (( Zahon derrière la montagne 1)) qui comprennent les lignages suivants :
Néo, Zouao-Gaakon, Zéan-Manémon et Séhinou ;
les Douanzorzzahon (ou (( Zahon en bas de Douan ») qui comprennent les lignages Guiriao-
Niéao, Téèho-Mouèzro-Bahon.
- Les Zahon furent regroupés au bord de la route Guiglo-Toulépleu en 1934.
5. Le canton Goum-Blao
- Les Blao marchaient à l'origine avec les Néao, et après l'éclatement de Zéaglo s'enfoncèrent
avec ces derniers vers l'Ouest et le Sud-Ouest. Les deux groupements s'installèrent sur la rive gauche du
Cavally, les Blaon au Nord, les Néao au Sud.
- Deux explications sont données quant à l'origine de l'expression Goum-Blao :
Goum serait une déformation de D~uo, nom de l'ancêtre qui a mis au monde tous les Blao ;
au moment de la pénétration française le chef des Blao, Zozon, était un vieillard qui bégayait :
l'expression Douo-Blao, véritable appellation des Blao, devint Goum-Blao ;
les Blao étaient les voisins directs des Dan, qui occupaient la rive droite du Cavally, et étaient
appelés Gon par les Guéré : d'où l'expression Gon-Blao, qui devint Goum-Blao. Les actuels Blao
prétendent qu'il n'y a jamais eu de métissage entre Blao et Gon.
- Le terme Blao serait une déformation également de ~ZOOq, ui désigne, parmi les éléphants, le
mâle solitaire, puissant et farouche. Ce qui signifie : les Blao, tout en n'étant pas nombreux, sont forts
comme hloo.
- Les Blao revendiquent, comme nous l'avons déjà signalé, un ancêtre commun, D~UO, mais
chacun des six lignages a son propre totem ; ces lignages, qui marchent deux par deux, sont :
Zouao - Yégao
Gwéao - Zro
Diou - Béao
- Les Blao ressortissaient, jusqu'en 1931, au commandement de Toulépleu. Ce fut à cette date
que l'administration les déplaça au bord de la route nouvellement ouverte, et les « intercala » entre les
cantons Zérabaon et Glokouion (les Zahon, qui n'étaient alors pas encore en place, furent à leur tout
intercalés entre les Blao et les Glokouion en 1934). Depuis, le canton Goum-Blao relève de l'autorité de
Guiglo.
LA MISE EN PLACE DES POPULATIONS GUÉRÉ ET WOBÉ (FIN) 9
6. Les cantons Néao-Blao Nord et Néao-Blao Sud
- L'appellation Néao-Blao est une réminiscence de l'ancienne alliance entre les clans Néao et
Blao, qui, comme nous l'avons déjà vu précédemment, (( marchaient ensemble H. Le terme Blao ne se justifie
en rien dans la dénomination du canton Néao, puisque les Blao forment depuis le début de la pénétration
coloniale leur propre canton (cf. ci-dessus Goum-Blao).
- Les Néao revendiquent un même ancêtre, mais ne sont pas d'accord sur son nom : pour les
Néao-Nord l'aïeul est Gnaq pour les Néao-Sud, Wissi. Quoi qu'il en soit, la tradition veut que les Néao
aient tous habité, avec les autres Zérabaon, sur la montagne Gnan, au voisinage de laquelle se trouvaient
également les Boo, non par suite d'une guerre, mais en quête de nouveaux terrains de culture. Sont-ils
partis avec les Zérabaon ou après seulement ? Toujours est-il qu'ils se retrouvent tous à Zéaglo. Après
l'éclatement de ce village, les Néao (toujours accompagnés des Boo), s'enfoncent dans la forêt vers le Sud-
Ouest, créant un premier village, Douandrou, puis un second village, Kohian-Oula. C'est là qu'une querelle
éclate entre les Néao et les Boo, qui s'installent alors plus au Sud. Les Néao forment un nouveau village,
Zohouo (au voisinage des Blao), qui ne tarde d'ailleurs pas à éclater. Selon les uns il y eut palabre,
selon les autres la séparation se fit parce que ils étaient trop nombreux. Un groupe de huit familles décida
de quitter Zohouo, et s'en alla créer un nouveau village, Douédi, au voisinage des Boo. Ils furent dès lors
appelés Boonéao (ou Booniao). Ce sont les Boonéao qui forment le canton Néao-Blao Sud. Les Néao qui
restèrent à Zohouo portèrent désormais le nom de Zohouokon, et formeront le canton Néao-Blao Nord.
- En résumé la séparation Boo-Néao et la fragmentation des Néao se sont donc faites de la manière
suivante :
Montagne Gnan
(Boo - Néao - Autres Zérabaon)
4
Zéaglo
4
Douandrou (Boo - Néao)
4
Kohian-Oula
J '*
Boo Néao
J,
Zohouo
J '*
Zohouokon Boonéao (Douédi)
(Néao-Blao Nord) (Néao-Blao Sud)
- Tous les Néao respectent un même totem, le serpent (SE).
- Les Boonéao ou Néao-Sud forment huit lignages exogamiques, marchant deux par deux :
Wohou - Djohou
Gahakon - Gbao
Diao - Goho
Gbehipahon - Woho
- Les Zohouokon ou Néao-Nord comprennent deux lignages majeurs, subdivisés chacun en trois
lignages mineurs exogamiques :
Tao : Kéwéiakon, Béhiédi, Dahokoadi ;
Djiaho : Néalokon, Kinwinkon, Ouléiékon.
10 Alfred SCkWARTZ
D AN
FIG. 1. - Le pays Zérabaon
LA MISE EN PLACE DES POPULATIONS GUÉRÉ ET WOBÉ (FIN) 11
7. Le groupe Guémalé (Sous-Préfecture de LogouaE)
- Guémalé : Gué = Guéré ; ma = Manbahon ((( les étrangers de Man ))) ; lé = habitants, hommes
(en Dan) ; littéralement (( les hommes Guéré et Manbahon H.
- Les Guémalé constituent un groupe de cinq villages, dont :
trois guéré : Tyonlé (ou Tinho)
Blotilé (ou Blodi)
Gouétilé (ou Gouéhédi) ;
1 manbahon (dan) : Yapleu ;
1 « métissé 1) : Toutigouiné, composé en réalité de deux villages :
o le village dan de Tontigouiné ;
l le village guéré de Douanteu ou Douandé.
- Les premiers habitants de la région furent les Manbahon, population dan venue de Man. Au
cours d'une guerre.contre-une tribu voisine ils firent appel à un groupement Zérabaon, les Nizoinhikon
(littéralement « les hommes du bas de l'eau ») réputés pour leur bravoure et leurs guerriers célèbres. Les
Nizoinhikon faisaient partie des Gouléo-Kouliaon et étaient établis par rapport aux Manbahon en aval
du 'N~O. Après la guerre, les Nizoinhikon restèrent sur place, vécurent côte à côte avec les Manbahon et,
comme ils étaient les plus nombreux, donnèrent leur nom au nouveau groupement.
- Selon un autre version, les Guéré qui vinrent en renfort aux Manbahon étaient ceux du clan
Kao (du groupe Zérabaon Kao-Ouaho). Parmi les actuels lignages guéré du groupe Guémalé, il y a effectivement
un lignage Kao, relativement important. Quoi qu'il en soit, l'origine Zérabaon des Guéré Guémalé
est incontestable.
- L'appellation Guémalé fut substituée à celle de Nizoinhikon par l'administration coloniale.
- Les Guéré du groupe Guémalé forment actuellement trois lignages majeurs, subdivisés en dix
lignages mineurs exogamiques :
Kao : Goao, Diékao, Zao, Guinkon ;
Tého : Dohou, Iriao, Dohouodikon, Bohokon ;
Séhinou : Gouliadikon, Powékon.
L'unité des Zérabaon nous paraît indiscutable : jusqu'à la formation du village de Zéaglo toutes
les traditions orales convergent. Il semble que les Zérabaon aient formé jusque là une vaste confédération
guerrière, qui se serait fait battre par un groupement plus puissant, et dont les survivants auraient
été obligés de fuir vers l'Ouest pour ne pas être totalement anéantis. Ce serait donc les débris de cette
confédération en déroute qui auraient fondé Zéaglo.
Que les différents clans ou groupes de clans aient très vite repris leur autonomie, une fois le calme
revenu, cela ne fait aucun doute. C'est ce qui explique que par la suite les Zérabaon ne constituèrent
jamais une confédération guerrière au sens des Zagné ou des Zagna. La tradition orale fait même état
de rapports plutôt conflictuels entre les différents groupes de clans Zérabaon : guerres entre Néao et Gbéou,
Gouléo-Kouliaon et actuels clans du canton Zérabaon de Blolequin...
II y eut quelquefois cependant des alliances partielles : Zahon-Gouléo-Kouliaon - Néao-Blao,
contre les Zaha, Néao et Blao contre les Dan.
12 Alfred SCHWARTZ
/
0
a
a
c3
/
Iin
.Ouloitoibli
-=Douébli (
A 0 N
'LEQUIN
TCHIENBAON __ Route principale
=.== Route secondaire
(LI BÉRIP) 0 Chef-lieu de Sous-préfecture
0 Echelle 10 Km
FIG. 2. - Le pays Boo
LA MISE EN PLACE DES POPULATIONS GUÉRÉ ET WOBÉ (FIN) 13
L'échange de femmes était cependant généralisé, avec néanmoins des restrictions pour les groupements
qui ne fa.isaient pas partie de la confédération (Zaha, Zagna, Fléo-Niaho), à l'exception toutefois
des Boo.
Nulle part nous n'avons retrouvé de trace de marché précolonial. Les échanges existaient pourtant
entre les groupements, mais n'avaient pas un caractère institutionnel.
B. LES Boo
- Boo : terme qui désigne une forêt très épaisse.
- L'histoire des Boo est étroitement liée à celle du clan Néao des Zérabaon. C'est en compagnie
de ces derniers qu'ils auraient quitté la montagne Gnan, chassés par la guerre. Mais la tradition
orale des Boo ne fait pas état de Zéaglo. Au terme de leur exode ils se seraient plutôt installés, toujours
avec les Néao, et en compagnie d'un autre groupement, les Kwinéon, sur les bords du Nzo, au voisinage
des Zaha. Ces derniers, qui étaient chasseurs, prêtèrent un chien aux Boo. Les Boo confièrent l'animal
aux Kwinéon, qui le perdirent dans la forêt. Quand les Zaha réclament le chien, les Boo sont incapables
de le leur rendre. La guerre éclate, les Boo se font refouler derrière la rivière Gouin, et les Kwinéon, pour
échapper à leurs poursuivants, franchissent le Cavally. Après les hostilités, les Néao, fidèles aux Boo,
les rejoignent et s'installent en leur voisinage.
- Les Boo revendiquent un même ancêtre, mais les traditions orales divergent sur le nom de
l'aïeul. 11 n'y a pas non plus unité de totem. Les Boo formaient plutôt un groupement de guerre composé
de douze clans exogamiques, marchant deux par deux :
Gaon - Waho
Wahou - Winlao
Séao - Kéo
Bapahon - Saho (ces quatre derniers clans sont appelés Bookwéa ou (( Boo du Haut 1))
Bahou - Wahou
Blaho - Tébao.
Il existe également, marchant avec le clan Kéo, une communauté Séhinou.
- Les Boo faisaient la guerre aux Nidrou, Fléo et même aux Néao. Mais ils auraient toujours
eu des relations amicales avec les Welao, qui étaient les alliés des Mao, clan dont l'aïeule serait issue du
groupement Boo. Ceci est contesté par les Welao qui, tout en reconnaissant le caractère particulier de
l'alliance Mao-Boo (qui ne peuvent en aucun cas se blesser), font état de guerres entre eux et les Boo
mais sans la participation des Mao.
- Selon nos informateurs les Boo n'auraient jamais pris femme hors de leur propre groupement,
à l'exception toutefois de celles qu'ils enlevaient au cours des guerres.
- Les Boo commerçaient avec les Fléo, les Néao, les Sabahon (leurs voisins libériens de derrière
le Cavally) et, en période de grande disette, même avec les Nidrou. 11 n'a cependant pas existé de marché
fixe et régulier.
C. LES GBAO
- Avant la pénétration coloniale il existait, dans le coude à 900 que fait le Cavally à la latitude
de l'actuel village de Kpaoubli, un groupement constitué de plusieurs lignages exogamiques, les Gbao.
La tradition orale fait partir les Gbao de derrière le Sassandra, du pays Niaboua, à la suite d'une guerre.
14 Alfred SCHWARTZ
- Les Gbao formaient leur propre bloa. Ils faisaient la guerre aux BOO, aux Nidrou et aux Béhoua,
aidés par les Welao. L'administration coloniale érigea le territoire des Gbao en canton, mais ceux-ci
s'enfuirent au Libéria en 1916. Ils revinrent en 1925, pour repartir, cette fois-ci définitivement, en 1930.
Ils forment actuellement au Libéria la « Gbarzon Chiefdom )) (Grand Gedeh County).
D. LES FL&+NIAHO
- Les Fléo-Niaho constituent les deux lignages majeurs d'un même clan, dont l'ancêtre, Bao-
Djé, aurait été mis sur terre par Dieu, au bord du Nzo, près de Guiglo :
Bao-Djé
Fléo-Dju Niaho-Dju
(aîné) (puîné)
4 4
Fléo Niaho
- Les Djédi ((( enfants de Djé 1)) habitaient ensemble, quand un jour un différend opposa les
deux branches de la famille. Djé enjoignit alors aux Niaho d'aller ailleurs.
- Une autre version veut que ce soit la guerre qui ait été à l'origine de l'éclatement du clan. Les
Djédi auraient été attaqués par des guerriers venus du Sud (de Tabou) et dirigés par Gao-Séhi. Les Fléo
s'enfoncèrent alors au plus profond de la forêt, vers le Cavally, et se séparèrent des Niaho.
a - Les Fléo
- Fléo : f7e, souffrir ; o, les hommes ; littéralement « les hommes qui souffrent )).
- Les Fléo comprennent six lignages mineurs, marchant deux par deux :
Kuilé - Yao
Zilaon - Mliaon
Tiètan - Séhinou
Quatre de ces lignages sont exogamiques, deux se subdivisent en segments de lignage (vz%) exogamiques
:
Kuilé : Ziao, Gouléakon, Nohokon, Glao, Yao ;
Tiètan : Diao, Zoulao, Mliaon.
b - Les Niaho
- Niaho : (( ceux qui ne sont pas aimés 1) (par leurs frères, les Fléo).
- Les Niaho forment cinq lignages mineurs, dont deux seulement marchent ensemble : Gouléaon,
Nidékon, Ibo-Yaibo, Guiladi. Les deux dernières entités constituent des unités exogamiques ; quant aux
autres elles se subdivisent comme suit :
Gouléaon : Gaho, Louahon (exogamiques) et Gouléaon, ces derniers se fragmentant en
groupes de deux familles étendues exogamiques :
Ouolandi - Guibédi
Gohédi - Guiriaon
Mahandi - Bohouglokon ;
LA MISE EN PLACE DES POPULATIONS GUÉRÉ ET WOBÉ (FIN)
//
,-------
---_I /-'
Vodélobl)
Djidoubo
> N I A H 0
- Limite de groupement de guerre
- Route
0 Chef-lieu de Sous-préfecture
Edldl~
0L5Km
ZAGNA
uiglo -
"
oudra Béoué
0
\ \
15
FIG. 3. - Le pays Fléo-Niaho et Daho-Doo
16 Alfred SCHWARTZ
Nidékon :
Tanahi-Mliaon (ces derniers se fragmentant en Zéréglokon-Zibénémékon, exogamiques)
Nido-Douaon
Sehon-Bahinbo (les Sehon se fragmentant en Douodi et Douaédi, exogamiques).
Les Fléo-Niaho se battaient contre les Zaha, les Doo, les Kouzié (qui habitaient la rive gauche
du Nzo) et les Krou. Ils n'avaient pas d'alliés. Ils prenaient leurs femmes partout, sauf chez les Krou et
les Kouzié (à l'exception des rapts de guerre).
Les Fléo-Niaho entretenaient des relations commerciales avec les Krou (captifs contre fusils et
poudre) et mêmes les Neyo (caoutchouc contre objets manufacturés) qui remontaient le Sassandra et le
Nzo en pirogue. Des échanges se faisaient également avec les groupements voisins ; mais il n'existait pas
de marché fixe et régulier.
Les Fléo-Niaho furent regroupés au bord de la route Guiglo-Taï, dont les travaux d'ouverture
et d'entretien nécessitaient une main-d'oeuvre importante, en 1932.
II convient de souligner l'extrême fragmentation des unités exogamiques des Fléo-Niaho : douze
pour les Fléo, quinze pour les Niaho, pour une population totale de 5 332 individus seulement (soit environ
200 personnes par unité). Cela est probablement à lier au profond isolement des familles Fléo-Niaho
au plus épais de la forêt, et à leur éloignement des groupements voisins. Ces contingences, pour ne pas
bloquer l'échange matrimonial, ont dû progressivement entraîner un assouplissement de plus en plus
grand des regles d'exogamie.
E. LES DAHO-DOO
- Les Doo, qui avant la pénétration coloniale marchaient avec les Daho (dont il n'existe actuellement
plus qu'un seul village en Côte d'ivoire, Ponan, et qui formaient un canton jusqu'en 1926, date à
laquelle la majorité s'enfuit au Libéria), forment, par rapport aux groupements guéré voisins, une communauté
tout à fait à part. Venus de derrière le Sassandra, du pays niaboua, qu'ils ont quitté à la suite de
dissensions internes au groupe Bohoulou (Doo signifie (( faire palabre, discuter ))), auquel ils appartenaient,
ils continuent à parler la langue de leur pays d'origine. Les Daho-Doo habitaient, à l'époque
précoloniale. sur la rive droite du Nzo, non loin de son embouchure avec le Sassandra. Ils furent regroupés
au bord de la route Guiglo-Taï en 1933.
- Les Doo se répartissent en dix lignages exogamiques :
Gwahiwo - Zahaiwo
Souho - Guiéo
Gbèho - Dguio
Zéo - Noao (groupe Gbao)
Bléhiwo - Gnoahiwo.
- Les Doo prenaient leurs femmes à la fois chez les Guéré, les Niaboua et les Bété (jusqu'à Soubré),
mais jamais chez les Krou. La tradition orale fait état de guerres contre les Niaho, avec l'aide des Zaha.
LA MISE EN PLACE DES POPULATIONS GUÉRÉ ET ?~VOBÉ (FIN) 17
Les populations entre Cavally et Nuon
Ces populations comprennent :
- les groupements de guerre Nidrou (1) Béhoua et Welao ;
- les clans Mao et Winlao.
A. LES NIDROU
- Les traditions orales relatives à la migration des Nidrou et à leur installation sur les bords
du Cavally sont légèrement divergentes d'un clan à l'autre.
Selon une première version, les clans désignés sous le vocable Nidrou, seraient partis de l'actuel
pays wobé où ils habitaient la frange forestière à l'Est de Man. Clans principalement de chasseurs, certains
de leurs éléments s'enfonçaient très loin dans la forêt, en direction du Sud-Ouest, en quête de gibier.
Les premiers à atteindre le Cavally furent les hommes du clan Guiro, au nombre de cinq. Sur les bords
du fleuve ils rencontrèrent une population autochtone, les Fan-Baon, agriculteurs sédentaires, avec qui ils
pratiquèrent pendant un certain temps le (( troc à la muette )) : le nouvel arrivant puisait le maïs dont il
se nourrissait dans les greniers des Fan-Baon et, en retour, déposait devant leurs cases la contrepartie
sous forme de gibier. Ces échanges, qui ne se faisaient jamais en présen.ce des intéréssés, se pratiquèrent
sans accroc jusqu'au jour où une famille autochtone s'estima lésée et saisit le prétexte pour attaquer
l'étranger : un chasseur Guiro fut tué, mais les quatre autres parvinrent à échapper aux Fan-Baon et
s'en furent donner l'alerte et chercher des renforts dans leur pays d'origine. Les autres clans se déclarèrent
solidaires des Guiro et, pour venger le chasseur tué, plusieurs Jignages se constituèrent en groupement
de guerre, sous l'égide de Keï-Bosran, gnerrier Zaha célèbre, titulaire de rzi-gri (2), objet magique, littéralement
K fétiche de l'eau X. Les Nigri parvinrent ainsi jusqu'au pays des Fan-Baon.
Selon certains de nos informateurs la guerre n'éclata pas tout de suite. Les Fan-Baon ayant
fait amende honorable, il était convenu que les Nigri dirigeraient le pays et, qu'en signe d'allégeance,
les Fan-Baon présenteraient toute bête noble (éléphant, panthère, buffle...) tuée par eux
à la chasse au chef du clan Guiro offensé. En gage d'alliance et d'amitié, le chef des Guiro donna
même une de ses filles en mariage au chef des Fan-Baon.. Pendant quelque temps les deux clans
(( marchèrent ensemble X, mais les Fan-Baon ne tardèrent pas à violer le pacte d'allégeance. Les
Nigri les sommèrent alors de quitter le pays, sous peine de guerre. Les Fan-Baon ne se firent pas
prier, traversèrent le couloir entre Cavally et Nuon (actuelle frontière entre Côte d"Ivoire et Libéria)
et se réfugièrent de l'autre côté de cette dernière rivière.
(1) Les Nidrou sont à cheval sur le Cavally. Mais leurs traditions d'origine étant plus proches de celles des Béhoua et
des Welao que de celles des Zérabaon nous les incorporons ici aux populations entre Cavally et Nuon.
(2) (en Guéré ni-koÉ : ~zi, eau ; ko& médicament, protecteur) est l'appellation donnée à cet objet par les Fan-Baon.
Ni-gri est imbibé d'eau chaque matin. Son rôle est double :
-rôle d'orienteur : porté par le chef de guerre qui marche en tete il lui indique la direction ;
- rôle de catalyseur : en cas d'« opération militaire », parvenu à proximité immédiate de l'ennemi, il déclenche
une pluie diluvienne qui déjoue la surveillance de l'adversaire et le neutralise. Il suffit alors de le surprendre et de l'écraser.
Par extension, les Fan-Baon appelèrent tout le groupement guerrier sous l'égide de cet objet magique ni-gri.
18 Alfred SCHWARTZ
Selon d'autres informateurs la guerre éclata tout de suite. Elle fut rude et longue (près
d'un an). Les Nigri remportèrent la victoire et refoulèrent les Fan-Baon derrière le Nuon (1).
Le terme Nigri se transforma en Nz%ou (2) et désigne encore actuellement l'ensemble des familles
qui ont participé à cette guerre.
A l'issue des hostilités le vainqueur s'établit sur les terres conquises et commence l'organisation
de l'espace. Chaque chef du lignage fonde son propre village. Le groupement de guerre, son rôle terminé,
se dissout de lui-même, mais l'alliance entre les familles se maintient en permanence (il n'y eut jamais
de guerre interne) et retrouve toute son efficacité par la suite dans les luttes qui opposent les Nidrou aux
Boo.
Selon une seconde version, les clans qui constituent le futur groupement Nidrou auraient été chassés
par un envahisseur d'un pays qu'ils situent en savane. La crainte d'être poursuivis les aurait fait s'enfoncer
dans la forêt vers l'ouest, jusqu'au Cavally. Là ils se heurtèrent aux Fan-Baon, qu'ils vainquirent et
refoulèrent de l'autre côté du Nuon. A l'issue des hostilités le vainqueur s'établit sur les terres conquises
et commence l'organisation de l'espace. Là les traditions orales divergent de nouveau legèrement quant à
la première implantation des Nidrou.
Selon une première version, les Nidrou se seraient installés sur la rive gauche du Cavally,
OU ils créèrent leur premier village, Bahia (entre Méo et Dénan). De là, deux frères du clan Séouandi,
Zohinon et Téwé, auraient été dépêchés par leur aïeul Séouan auprès de Flan-Djéhou, prestigieux
chef des Béhoua (groupement que semblaient déjà connaître les Nidrou, et qui les aurait
précédés de peu dans le couloir entre Nuon et Cavally) pour quérir aurpès de lui les « protecteurs »
dont les Nidrou avaient besoin pour se concilier les génies et les esprits de cette terre qu'ils venaient
d'occuper. A la demande de Flan-Djéhou, Zohinon et Téwé s'installent pour quelque temps à
proximité des Béhoua, et créent leur propre village, Kwoho (actuellement en territoire libérien).
Mais un conflit grave ne tarde pas à éclater entre les deux frères, au sujet d'un combat de taureaux.
Flan-Djéhou, pour mettre fin à la querelle, enjoint à Zohinon de retourner sur la rive gauche du
Cavally. Quant à Téwé il s'enfonce encore davantage dans la forêt libérienne et crée Ploho (3).
Selon une seconde version, les Nidrou se seraient tout d'abord établis, sous la direction
du clan Séouandi, au Sud des Béhoua, à Kwoho, dans le couloir entre Nuon et Cavally. Quand
éclate le conflit entre Zohinon et Téwé Flan-Djéhou demande à Zohinon de gagner avec ses
partisans la rive gauche du Cavally, tandis que Téwé entraîne les siens à Ploho (4).
(1) On retrouve de nos jours des villages Fan-Baon sur la rive droite du Nuon, au Libéria. La riviere Nuon constituait
en effet une ligne de démarcation facile à défendre. Fan-Baon (fa-buo) signifie littéralement « nombreux peureux ». Il semble
que la lutte ait finalement été moins rude que ne le rapporte la tradition orale Nidrou. A l'approche de l'envahisseur les Fan-
Baon abandonnaient leurs villages et fuyaient vers l'ouest. C'est ce qui leur valut le surnom de « peureux ».
(2) La transformation de Nigi en Nidrou semble être uniquement le fait d'une mauvaise transcription phonétique au
moment de la pénétration française. et le terme Nidrou actuel ne doit pas etre pris dans son sens éthymologique premier :
rzi, eau : dru, téte ; soit « tête de l'eau », par extension « source », et désignant une localité située à proximité de la source d'une
rivière. En effet, dans l'ouvrage publié par la mission Hostains-d'Ollone «De la Côte d'ivoire au Soudan » qui passe dans la
région en 1900, le Capitaine d'ollone parle déjà de Nigri (cf. la carte ethnique qu'il a dressée des régions traversées).
(3) On nous a effectivement signalé l'existence d'un lignage Séouandi à Mapahon, Grand Gedeh County, au Libéria.
(4) Cette version, qui est celle des Béhoua, nous paraît peu vraisemblable.
LA MISE EN PLACE DES POPULATIONS GUÉRÉ ET WOBÉ (FIN) 19
- Les clans du groupement de guerre Nidrou, qui jadis marchaient deux par deux, sont les suivants
:
Klaon - Glao
Zaha - Zouao
Kpao - Ouléokon
Séouandi - Doueyakon
Gbahou - Zilokon
Douwiakon - Zirébokon
Kpahon - Zoulao
Dakon - Kaakon
Diéoulakon - Waho
Guirapahon - Guiléikon
Kouaou - Guidékon
Guiro - Fan-Baon (jusqu'au départ de ces derniers)
Glakon, clan allié aux Nidrou, mais dont l'origine est différente et l'implantation antérieure.
Tous ces clans sont exogamiques, à l'exception des clans Séouandi (subdivisé en quatre lignages
majeurs : Douhozékon, Gbéo, Méo, Zirébokon) et Glalton (trois lignages majeurs : Kanakon, Kalou,
Panhiaikon).
B. LES BÉHOUA
- Sous la conduite de l'ancêtre fondateur du clan, Flan-Djéhou, les Béhoua (beua, littéralement
« il est bien habillé )), par extension (( riche, puissant 1)) sont partis de Ouhia-Pléa, leur village d'origine,
situé dans la savane au Nord de l'actuel pays wobé. Ils en auraient été chassés par un envahisseur venu
du Nord.
- Il semble que dès cette époque, le clan (tks) Béhoua, sous l'égide de son prestigieux chef, Flan-
Djéhou, soit parvenu à rallier à lui et à entraîner dans son sillage tout un ensemble de groupuscules claniques
voisins, faiblement organisés politiquement et menacés d'extermination par l'envahisseur. Autour
de Flan-Djéhou se constitue alors un véritable groupement d'alliance et de guerre, qui prendra le nom
du clan-leader : le groupement Béhoua.
- L'itinéraire emprunté par les Béhoua les aurait menés d'abord en direction du Sud, jusqu'à la
hauteur de Guiglo, puis vers l'ouest, jusqu'au Cavally. Ils ne rencontrèrent d'autre groupement ni en
cours de route, ni entre Cavally et Nuon.
- Le premier village Béhoua s'édifie sur une hauteur au Sud de l'actuel Toulépleu, et porte le
nom de Drougbabli.
- Les Béhoua faisaient la guerre aux Dan (Winlao), aux Welao et étaient tantôt les alliés, tantôt
les ennemis des Nidrou (mais en cas de conflit les Séouandi se tenaient à l'écart). La tradition orale fait
état de guerres internes aussi : clan Béhoua contre Nesson, Zao et Tiao. L'échange de femmes était généralisé,
mais ne dépassait cependant pas le cadre des groupements guéré.
- Il existait sur l'ancien territoire des Béhoua deux marchés, qui se tenaient régulièrement tous
les sept jours : le premier sur le Nuon, au contact des populations de I'Hinterland libérien, le second
à la frontière du pays dan. La voie de pénétration naturelle que constitue le couloir entre Nuon et Cavally
a de tous temps favorisé la circulation des hommes et des biens. A l'époque précoloniale il existait de
véritables courants commerciaux à longue distance entre, d'une part la zone soudanienne du Nord, d'autre
20 Alfred SCHWARTZ
part la côte libérienne. Les Béhoua, dans ce trafic entre l'intérieur du continent et la côte, servaient essentiellement
d'intermédiaires. La nature des principales transactions était la suivante :
courant Nord-Sud (zone soudanienne-côte) : sel gemme, poisson séché, pagnes de fabrication
locale (kwea-girie, pagnes du Haut), mais surtout captif. Les captifs provenaient d'origines
diverses : les uns étaient amenés depuis l'intérieur du continent (zone soudanienne) et ne
faisaient que transiter par le pays guéré ; d'autres, captifs de guerre dan essentiellement, grossissaient
le flot à partir de Toulépleu ;
courant Sud- Nord (côte-intérieur du continent) : cola, sel marin, pagnes d'importation
(zwEi-gaie? pagnes du Bas), marmites et seaux en cuivre (que les Guéré transforment en bracelets,
digË, qui jusqu'à une époque toute récente constituaient la monnaie spécifique de l'échange matrimonial),
mais surtout fusils de traite et poudre.
- 11 nous a été impossible de savoir comment les clans se fédéraient à l'intérieur du groupement
Béhoua. Ces clans (tk&). qui continuent tous à constituer des entités exogamiques, sont les suivants :
Gbéhou, Winlao, Nesson, Tiao, Glao, Doho, Dougoho, Gbahiao, Zao et Guiao.
C. LES WELAO
- Ce n'est pas une invasion guerrière qui aurait été à l'origine de la migration du clan Welao,
de la savane vers la forêt, mais une grande famine. Sous la direction de leur chef Bah, et en compagnie
d'un clan de pêcheurs, originaires du Mont Nimba, les Glao, avec lequel ils forment un groupement
d'alliance, les Welao longent le Cavally, et s'installent sur la rive droite du fleuve, à Blahobli, au Nord de
l'actuel village de Tahibli.
- Les Welao et les Glao auraient été précédés sur cet itinéraire par le clan des Glakon (futur
allié des Nidrou), partis des pieds du Mont Nimba, à la recherche de terres plus fertiles et moins peuplées.
Après une série de conflits armés avec les Dan, ils gagnent la rive gauche du fleuve et s'installent à Guinodja,
sur une hauteur non loin de l'actuel village de Glakon-Mayoubli.
- Welao et Glakon sont donc amenés à vivre côte à côte. Les Glakon, invoquant les droits et
les privilèges du premier occupant, imposent aux nouveaux arrivants un certain nombre d'obligations :
toute bête noble (panthère, antilope, boa...) tuée à la chasse doit être déposée devant le chef des Glakon.
Les Welao se soumettent bon gré mal gré à ce rituel d'allégeance répété, jusqu'au jour où l'un de leurs
chasseurs se fait, en plus, malmener. La guerre éclate, mais les Glakon, victorieux, refoulent les Welao
derrière le Cavally.
- Les Welao se mettent alors sous la protection des Béhoua et obtiennent de Flan-Djéhou le
droit de s'installer sur les terres anciennement occupées par les Nidrou. Dans leur marche vers le Sud,
ils sont guidés par un clan Béhoua, les Guiraikon, qui progressivement échappent totalement à Flan-
Djéhou, et seront assimilés par les Welao.
- Le groupement de guerre Welao comprendra donc les clans Welao, Glao et Guiraikon. Il s'y
ajoutera par la suite des éléments d'un autre clan, le clan Winlao, qui, comme nous le verrons ci-dessous,
occupe une place à part dans le peuplement du couloir entre Nuon et Cavally.
- Les Welao, malgré la protection que leur accorda à l'origine Flan-Djéhou, entretinrent par la
suite des rapports plutôt conflictuels avec les Béhoua. Ils firent également la guerre aux Nidrou, aux Mao
(clan qui occupait le Sud du seuil de Péhé-Kanhouébli) et aux Boo (ce qui est contesté par ces derniers).
Ils se faisaient aider par les Gbao, qui avaient cependant conservé leur indépendance par rapport au
groupement de guerre Welao.
LA MISE EN PLACE DES POPULATIONS GUÉRÉ ET WOBÉ (FIN)
= Roule principale
- Route secondaire
0 Chef-lieu de Sous-préfecture
EKh~llf2
0
FIG. 4. - Le couloir entre Nuon et CavallY
D. LES MAO
- Avant la pénétration coloniale, les Mao formaient un clan qui occupait le Sud du seuil de
Péhé-Kanbouébli. Ils étaient répartis en trois villages et provenaient d'un groupement de 1'Hinterland
libérien, le groupement Gbarzohn (Grand Gedeh County), dont ils s'étaient détachés pour une raison
inconnue. Dès le début de la pénétration coloniale, deux villages (sur les trois) retournèrent au Libéria,
où ils forment actuellement le (( Biai Chiefdom x Il reste actuellement un seul village Mao en Côte d'ivoire,
Péhé-Kanhouébli.
22 Alfred SCHWARTZ
- Les Mao se battaient avec les Gbao et étaient tantôt les alliés, tantôt les ennemis des Welao
(la tradition orale ne fait toutefois état que d'un.e seule guerre avec les Welao). Les Mao, dont l'aïeule
serait issue du groupement Boo, entretenaient avec ces derniers des rapports d'alliance et d'amitié d'un
caractère particulièrement privilégié.
E. LES WINLAO
- Le clan Winlao occupe une place à part dans l'histoire du peuplement du couloir entre Nuon
et Cavally. A l'origine les Winlao ne font partie d'aucun groupement guéré, mais constituent l'élément
le plus méridional des populations dan. De par leur position gzographique même, ils étaient les plus
exposés aux luttes incessantes que se livraient Dan et Guéré, et dont l'enjeu consistait essentiellement,
pour ces derniers, à faire des captifs.
- A l'arrivée du colonisateur, les Winlao se trouvaient ainsi éparpillés entre Nuon et Cavally,
soit comme captifs individuels, soit dans des villages de captifs. Leur libération ne devait qu'accroître
encore leur dispersion : les uns regagnèrent leur pays d'origine, d'autres demeurèrent sur place et tentèrent
de reconstituer des unités sociales viables, d'autres encore furent littéralement absorbés par leurs anciens
maîtres, par un phénomène d'intégration pure et simple, par les patrilignages (( propriétaires », de la
descendan.ced e l'ancien. captif.
- Les Winlao sont donc actuellement présents dans la région de Toulépleu sous trois formes :
les éléments du groupement Dan-Winlao, qui ont toujours conservé leur liberté ; il faut y
ajouter ceux qui ont regagné leur pays au moment de la pénétration coloniale ;
les anciens captifs qui, une fois libérés, sont demeurés sur place, et ont été progressivement
intégrés au groupement de leur maître (ce qui explique que l'on retrouve des Winlao aussi bien
chez les Béh.oua que chez les Welao et les Nidrou) ;
les descendants de captifs, entièrement u assimilés )) à l'heure actuelle (du moins en apparence)
aux patrilignages guéré.
CONCLUSION : LE PROBLÈME DES SÉHOU ou SÉHINOU
Au terme de cette analyse, mention tout a fait particulière doit être faite d'une population qui
est présente à peu près partout (nous l'avons retrouvée auprès de quatorze groupements guéré et wobé
différents) et qui est appelée, suivant les régions, Séhou, Séhon, Séhinou, Séhidignon, Séhidi ou Séhadi.
Les Séhou présentent une double particularité : ils ont tous le même interdit alimentaire (le poisson,
sil~i), tout en se mariant d'un groupe à l'autre ; l'ensemble des autres populations leur accorde la préséance
dans toutes les manifestations de la vie sociale. Ces deux caractéristiques, auxquelles s'ajoute une
appellation à peu près identique d'un bout à l'autre du pays, suffisent pour faire des Séhou une communauté
culturelle parfaitement homogène.
Cette homogénéité disparaît, malheureusement, dès que l'on essaie de poser le problème de leur
origine. Les réponses sont aussi nombreuses que les groupements Séhou eux-mêmes. Le mythe d'émergence
le plus original nous fut fourni par la communauté Séhou du groupement Zahon (village de Guinkin).
Il explique à la fois l'interdit alimentaire et la supériorité reconnue aux Séhou par les autres populations.
L'ancêtre des Séhou ou Séhinou. Séhi, est un poisson, sorti de la mer et déguisé en homme. Séhi,
qui est très beau, se K promène 1) beaucoup et a de nombreuses « fiancées ». Partout où il passe il laisse
des enfants, qui respectent le totem de leur père. Mais un beau jour il décide de se fixer. Il s'installe alors
à Zéaglo. Non loin de là, dans le village de Gbohoulou, vivait un homme appelé Zoué. Séhi et Zoué, à
l'instigation de ce dernier, concluent un pacte qui stipule que quiconque commettrait l'adultère avec l'une
LA MISE EN PLACE DES POPULATIONS GUÉRÉ ET WOBÉ (FIN) 23
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FIG. 5. - Implantation de noyaux Séhou ou Séhinou
24 Alfred SCHWARTZ
de leurs femmes respectives serait puni de mort. Or voilà que Gwè. fils de Séhi, a des relations avec une
femme de Zoué. Celui-ci réclame le jeune homme pour lui faire subir le châtiment. Malgré les supplications
des proches de Gwè. Zoué demeure inflexible et le coupable est mis à mort.
A quelques temps de là, Gbouho, fils de Zoué, est surpris à son tour avec une femme de Séhi. Séhi
réclame le coupable et I'emméne dans son campement. Mais là, au lieu de tuer le jeune homme, il
sacrifie un mouton, et fait envoyer le foie à Zoué. Le lendemain il ramène lui-même Gbouho à Gbohoulou
et le remet à son père avec ces paroles : « Voilà ton fils. Sache que mon coeur n'est pas aussi méchant
que le tien ». Zoué, confondu par tant de magnanimité et de générosité, décida dès lors de se mettre sous
le comman.dement de Séhi. Depuis, tous les Guéré et Wobé reconnaissent la supériorité des Séhinou.
Selon une étude de M. Alluson les Séhinou (( sont considérés comme les anciens guerriers et administrateurs
de la région (1). Ailleurs cet auteur écrit : (( Ils (les Séhinou) apparaissent comme les descendants
d'administrateurs d'un royaume disparu 1) (2). Cette hypothèse supposerait que les Séhinou soient
les premiers occupants des pays guéré et wobé ; ou même, pour aller plus loin, qu'avant l'implantation
des groupements actuels, il y ait eu un peuplement autochtone, dont les Séhinou seraient les derniers
vestiges. Ceci expliquerait la supériorité reconnue aux Séhinou par le respect que doit tout nouvel arrivé
à celui qui a été le premier à occuper une terre, donc qui en est le propriétaire. Mais cette hypothèse n'est
confirmée par aucune des littératures orales des autres groupements.
La figure 5 donne une idée de l'éparpillement des noyaux Séhou ou Séhinou.
B. ESSAI DE SYNTHÈSE ET DE CHRONOLOGIE
L'analyse des données de la tradition orale relatives à l'implantation de chacun des groupements
guéré et wobé sur le territoire actuel nous permet de distinguer trois groupes de populations :
- les populations se disant « autochtones X, à ancêtres d'origine mythique (ciel, lune, air, terre,
eau, feu) ;
- les populations dont la provenance est liée à un courant migratoire à longue distance (migrations
externes) et à ancêtres réels :
populations originaires de l'Est (K de derrière le Sassandra J)) ;
populations originaires du Nord (savane et rive droite du Sassandra) ;
populations originaires du Sud (,Libéria) ;
- les populations dont l'arrivée est liée à des courants migratoires internes (migrations internes) ;
courants migratoires du Nord vers le Sud ;
courants migratoires du Sud vers le Nord.
(1) BDPA. Étudeg énéralede la régiond e Man. Ministèred u Pland e la Républiqued e Côted 'koire. Rapportn o4 :
Études ociologique t démographiqupea, r M. Allusson,p . 185.E nquêtem enéed e 1962à 1964
(2) Rapport cité, p. 207.
LA MISE EN PLACE DES POPULATIONS GUÉRÉ ET WOBÉ (FIN) 25
1. Les noyaux « autochtones 1)
Les groupements se disant autochtones sont essentiellement constitués par les Wobé et les populations
guéré entre Sassandra et Kô-Nzo :
- Wobé :
ensemble de la confédération Gbéon, moins les Kouao ;
ensemble de la confédération Zoho, moins les Saho ;
- Guéré :
deux groupements Zibiao : Niaho et Goléo ;
ensemble de la confédération Zagné, moins les Gbowon :
trois groupements Zagna : Blaon, Tiètan, Tièmesson, plus un clan Bilou (Djibo) ;
ensemble du groupement de guerre Zaha.
A ceux-ci s'ajoute le groupement Fléo-Niaho, dont la première implantation était d'ailleurs également
sur les bords du N~O.
2. Les migrations à longue distance ou externes
a - Les populations originaires de l'Est : elles se répartissent en quatre grandes catégories :
- les populations Saho, d'origine niédéboua, présentes en pays wobé (confédérations Zoho et
Baon) et en pays guéré (confédération Zagné, groupement Vallon-Djimahon.) ;
- les populations des groupements Daho-Doo et Gbao, d'origine niaboua ;
- les populations de la confédération Zérabaon et du groupement Boo, dont le point de départ
serait constitué par la montagne Gnan (ou Gnahia). située par les uns en pays niédéboua, par les autres
beaucoup plus à l'Est ;
- les populations d'origine malinké (Séguéla) de la confédération Baon (Sémian, Koua et Blaon).
b - Les populations originaires du Nord : il s'agit essentiellement des Guéré de Toulépleu : Nidrou,
Béhoua, Welao, que la tradition orale fait partir, pour les Nidrou et les Béhoua de la savane au Nord de
l'actuel pays wobé, pour les Welao du Mont Nimba. Mention doit être faite ici également du micro-groupement
des Zouagnon (pays wobé), d'origine toura.
c - Les populations originaires du Sud : deux groupes de populations revendiquent une origine libérienne
:
- la confédération Zibiao, moins les groupements Niao et Goléo ;
- le clan Mao (Guéré de Toulépleu).
3. Les migrations internes
Ces migrations sont soit collectives soit individuelles :
- collectives :
du Nord vers le Sud : groupement Gbowon? de la confédération Zagné, parti du pays wobé,
confédération Gbéon, groupement Gbéan ;
- Limite de Canfédërahon
Lmte de Groupemeot
ZAGNA Gonf~dérol~on
Gbowon Groupement
@ Chef heu de Sowpréfecfurq
. Village
-A Route pnncipo,e
I BÉRIA
II\\I \ /
l
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FIG. 6. - Les populations guéré et wobé (habitat ancien et implantation actuelle)
LA MISE EN PLACE DES POPULATIONS GUÉRÉ ET WOBÉ (FIN) 27
groupement Guéo, de la confédération Zagna, parti du Nord du pays Tahouaké ;
du Sud vers le Nord :
l groupement Kouao, de la confédération Gbéon (pays wobéj, parti du groupement
Zaha (pays guéré) ;
l groupement Séhou, de la confédération Zagna, parti du groupement Zahon, de la
confédération Zérabaon ;
- irldividzrelles : elles sont innombrables. Chaque groupement comprend en effet une ou plusieurs
familles d'origine étrangère, venues généralement d'un groupement voisin, mais quelquefois aussi de très
loin. Les causes de ces (( migrations )) individuelles sont multiples. Certains départs sont volontaires :
attrait exercé par tel ou tel bio connu pour sa générosité en matière matrimoniale : recherche de terres plus
fertiles, de forêts plus giboyeuses ou d'eaux plus poissonneuses ; surenchère de materneIs désireux de se
créer un maximum de dépendants, etc. D'autres se font sous la contrainte : individu banni du groupement
à la suite d'un crime ou sous l'accusation de sorcellerie (cas très fréquent), querelles intestines... ou encore
transfert d'individus d'un groupement à un autre par rapt en temps de guerre, vente ou échange de captifs.
etc.
Conclusion : principales phases de peuplement et chronologie
Dans son article (( En quête d'une chronologie ivoirienne )) (1) Yves Person, parlant des populations
Krou à l'Ouest du Bandama, écrit : « il s'agit... d'une zone dont l'histoire s'est déroulée dans un isolement
exceptionnel, à un rythme très lent et dans un cadre très morcelé ; ses lignes générales seront donc très
difficiles à reconstituer H.
Malgré l'enquête détaillée et minutieuse à laquelle nous nous sommes livré, et dont les pages précédentes
fournissent les données brutes, les résultats auxquels nous sommes parvenus ne constituent cependant
encore que des hypothèses de travail, que seule une meilleure connaissance de l'origine des populations
voisines permettra de confirmer ou d'infirmer.
Notre hypothèse de base est que la mise en place du peuplement guéré et wobé a dû, en gros, se faire
en trois étapes :
- mise en place des populations se disant autochtones ;
- mise en place des populations originaires du Nord ;
- mise en place des populations originaires de l'Est.
Ces trois étapes sont probablement liées à des migrations « historiques J), c'est-à-dire à des mouvements
de populations dont l'ampleur dépasse les seuls groupements qui nous intéressent, et dont les effets
se sont répercutés sur de longues distances. Or les grands mouvements de population qui ont affecté la
Côte d'lvoire sont de deux ordres :
- la poussée Mandé, qui depuis bien avant le 1.F siècle déjà s'effectue du Nord vers le Sud, de
la savane vers la forêt. Dans l'Introduction à l'ouvrage collectif déjà cité, (( The historian in tropical Africa )),
(1) Yves PERSON : « En qu+te d'une chronologie ivoirienne », chapitre 13, page 335, de l'ouvrage collectif « The historian
in tropical Africa ». Publié pour l'International African Institute par l'oxford University Press. London. Tbadan.
Accra. 1964.
28 Alfred SCHWARTZ
rédigée par Vansina, Mauny et Thomas, ces auteurs écrivent : (( On peut présenter provisoirement l'extension
Mandé comme suit. Quelques vagues anciennes, mais impossibles à dater exactement, poussent
certains groupes Mandé (Toma, Guerzé) vers le Sud (où existaient peut-être déjà des Mandé en bordure
de la forêt). vers l'Est . . . . vers le Nord-Est... ; . . . L'ensemble de ces migrations a probablement duré longtemps
et dut être fort complexe...
Avant le 15e siècle, mais après les mouvements anciens déjà évoqués, se place une diffusion à
fin économique qui suit - ou crée - les routes commerciales de la kola, des esclaves et de l'or. Il y en eut
deux principales :
1. celle qui menait de la boucle du Niger à l'or ashanti..
2. celle qui, partant de Tombouctou et de Mali, remontait le Niger, parvenait à la Côte de la Sierra
Leone... )) (1).
Dans son article du même ouvrage, Yves Person signale par ailleurs une poussée guerrière Mandé
de la vallée du Niger jusqu'à la mer, vers la Sierra Leone- vers le milieu du 16e siècle. Puis il mentionne
une nouvelle poussée vers Touba et la forêt, en direction du Libéria, K 50 à 80 ans plus tard )) ;
- l'éclatement du pays Akan à l'Est, et la migration, au milieu du 18e siècle, des Baoulé-Agni de
l'Est vers l'Ouest.
Il est probable que la mise en place des principaux groupements guéré et wobé se soit faite sous
l'effet de ce double mouvement de populations, et ceci en trois étapes.
1. Mise en place des populations se disant autochtorles
Toutes les hypothèses sont possibles à leur sujet. Mais il est vraisemblable que les populations guéré
et wobé se disant autochtones, dont l'habitat originel devait être beaucoup plus septentrional, aient subi
le contrecoup des premières vagues Mandé et aient très tôt, été refoulées de la savane vers la forêt. Les
groupements les plus anciennement établis sont sans doute les Gbéon et les Zoho (Wobé), à cheval sur la
lisière forêt-savane. Au fur et à mesure que d'autres populations arrivaient et que la pression démographique
se faisait plus forte, la pénétration dut se faire de plus en plus vers le Sud, mais l'occupation de
l'espace resta limité à la zone comprise entre Sassandra et Kô-Nzo (les Fléo-Niaho, groupement le plus
méridional, rappelons-le, occupaient autrefois les bords du N~O).
Les données généalogiques nous ont été d'un très faible secours dans nos tentatives de situer chronologiquement
l'implantation des populations se disant autochtones. Les règles d'exogamie n'étant que
très peu contraignantes chez les Wobé et les Guéré de l'Est, la connaissance qu'ont les individus de leurs
ancêtres est décevante (elle ne dépasse guère 5 à 6 générations). Dans un cas cependant, un vieillard Blaon
(confédération Zagna), Président du conseil coutumier de son village (il s'agit de Petit-Duékoué), doué
d'une mémoire généalogique étonnante, remonta, sans hésitation, jusqu'à l'ancêtre créateur du clan, issu
de la montagne Bla, et distant de 17 générations (et redescendit aussi aisément, sans la moindre erreur).
Si cette généalogie est exacte (et nous avons toutes les raisons de croire qu'elle l'est), les Blaon se seraient
installés dans la région de Duékoué il y a 500 ans environ (2), soit vers le milieu du 15e siècle. Selon
notre hypothèse, l'implantation des groupements plus septentrionaux serait donc plus ancienne encore.
(1) Ouvrage cité, page 38.
(2) 17 générations, à raison de 25 années par génération, ce qui donne 425, plus l'âge de l'informateur.
LA MISE EN PLACE DES POPULATIONS GUÉRÉ ET WOBÉ (FIN) 29
2. Mise en place des populations se disant originaires du Nord
Il s'agit des Guéré de Toulépleu : Nidrou, Béhoua et Welao. L'étude en profondeur que nous avons
menée sur le groupement Nidrou (1) nous entraîne à formuler les hypothèses suivantes.
La tradition orale Nidrou (et celle des Béhoua est identique) veut que les clans de l'actuel groupement
aient vécu autrefois en savane, et aient été chassés (( manu militari ». Cette même tradition fait état
ensuite d'une migration qui aurait amené les Nidrou de l'actuel pays wobé jusqu'au Cavally.
La migration Nidrou a' à notre avis, dû se faire en deux temps. En un premier temps les futurs clans
Nidrou, refoulés par un envahisseur de la savane vers la forêt (il s'agit probablement de l'une des poussées
Mandé que signale Yves Person et qu'il situe, la première vers le milieu du 16e siècle, la seconde « 50 à
80 ans plus tard ») auraient trouvé refuge en pays wobé. Mais soit par crainte de ne pas être assez loin de
leurs poursuivants, soit parce que la pression démographique était devenue trop forte, soit pour une autre
raison, les Nidrou entamèrent, en un deuxième temps, une seconde migration, qui devait les amener d'abord
plein Sud jusqu'aux environs de l'actuel centre de Guiglo, puis plein Ouest jusqu'au Cavally (la tradition
orale relate cette marche (( en équerre ))). Pourquoi ce brusque changement d'itinéraire ? Les Nidrou
se seraient-ils heurtés, sur les bords du Nzo, à d'autres populations qui les auraient empêchés de progresser
plus loin vers le Sud ? Ou faut-il effectivement accréditer la version des chasseurs Guiro malmenés sur
les bords du Cavally par une population autochtone, les Fan-Baon, et que des clans amis seraient venus
venger ? Mais est-il vraisemblable que des chasseurs s'éloignent aussi loin de leur point d'attache (du
pays wobé jusqu'au Cavally, en passant par Guiglo, il y a deux cent kilomètres) ?
Quoi qu'il en soit, les Nidrou se sont installés sur les bords du Cavally à la fin du 17e ou au début
du 18e siècle. Les données généalogiques, d'un clan à l'autre, concordent pour situer l'aïeul qui a participé
à cette seconde migration à 9-10 générations en moyenne (2) ce qui fait en gros 250 à 300 ans.
3. Mise en place des populations se disant originaires de l'Est
11 est à peu près certain que la mise en place des populations se disant originaires de l'Est soit postérieure
à la fois à celle des noyaux (( autochtones » et à celle des groupements originaires du Nord. En
effet, les Nidrou et les Béhoua. qui dans leur marche vers l'Ouest ont traversé le pays Zérabaon, n'ont
rencontré personne entre Nzo et Cavally. Par contre les groupements Zérabaon font tous état de la présence,
au moment de leur arrivée, de groupements comme les Zagna, Zagné ou Zaha.
Les données généalogiques recueillies en pays Zérabaon situent les ancêtres venus de l'Est à 6-7
générations en moyenne, ce qui ferait à peu près coïncider cette migration avec celle qui amena du pays
Ashanti en Côte d'ivoire, vers le milieu du 18e siècle, les Baoulé et les Agni. Ph. et M.A. de Salverte-
Marmier, qui ont étudié le peuplement baoulé d'une façon particulièrement approfondie (3) font effectivement
état, à l'arrivée de ceux-ci, d'un refoulement de Gouro, qui occupaient alors le V baoulé, au-delà du
Bandama. Parlant des Gouro ces auteurs écrivent : (( Un grand nombre d'entre eux ont été refoulés dans
leur territoire actuel entre Bouaflé, Gagnoa, Mankono et Man )) (4). Il est vraisemblable que l'installation
(1) Cf. multigraphieO RSTOM 119 p. « Ziombli : I'orgatdsation sociale d'un village Guéré-Nidrou ». Abidjan,o ct. 1965.
(2) Pour des raisons essentiellement matrimoniales (détermination de la sphère des mariages possibles), la connaissance
généalogique, en pays Nidrou est assez extraordinaire. Elle permet de rattacher n'importe quel individu isolé par un lien de
parenté précis, par référence à l'ancetre, à tout autre individu du même clan.
(3) Ministère du Plan de la République de Côte d'ivoire. Étude régionale de Bouaké 1962-1964. Tome 1 : «Le peupIement
». Cf. Introduction : « Les étapes du peuplement », et notamment la partie relative au peuplement ancien et à l'arrivée
des Baoulé, étude faite par Ph. et M.A. DE SALVERTE-MARMIER,
(4) Ph. et M.A. DE SALVERTE-MARMIER, rapport cité page 17.
30 Alfred SCHWARTZ
Populabons se disant autochton
E3 Populations originaires de l'Est
IIllun Populations oriqinalres du Nord
m .Populatcons originaires du Sud
m Implantbtion après migration interne
FIG. 7. - Les origines du peuplement
LA MISE EN PLACE DES POPULATIONS GUÉRÉ ET WOBÉ (FIN) 31
des Gouro sur leur habitat actuel ne se soit pas faite sans susciter d'autres déplacements vers l'Ouest. La
migration des Guéré-Zérabaon et des groupements se disant originaires des pays niaboua et niédéboua
est peut-être liée à ce mouvement de populations.
L'arrivée des groupements malinké du canton Sémien actuel (pays wobé), originaires de la région
de Séguéla, se fit à peu près à la même époque (milieu du 18e siècle). Mais leur déplacement semble uniquement
consécutif à des querelles de famille.
Tous ces résultats, rappelons-le. ne constituent évidemment que des hypothèses de travail. Leur
établissement laisse en effet la place à trop d'incertitudes encore. Une donnée est cependant certaine : il
n'est plus possible d'admettre, comme l'ont fait certains auteurs (l), que le peuplement guéré se soit fait
à partir de l'ouest. Nous avons vu que des familles isolées sont effectivement parties du Libéria, mais elles
ne constituent qu'une fraction insignifiante du peuplement guéré.
(1) Pierre DUPREY notamment dans « Histoire des Ivoiriens : naissance d'une nation », qui, page 33, écrit : « La plupart
des populations de l'Ouest de la Côte d'ivoire semblent être sorties de l'immense forêt du Libéria à des époques très différentes
».
CHAPITRE 2 - IMPACT COLONIAL ET EQUILIBRES NOUVEAUX
L'analyse détaillée des données de la tradition orale relatives à la mise en place du peuplement guéré
et wobé HOUS a permis de définir avec précision la nature exacte des groupements traditionnels. II convient
maintenant de voir dans quelle mesure la mise en place de l'appareil administratif issu de la co?lqrtête coloniale
a tenu compte des équilibres anciens.
A cet effet nous rappellerons tout d'abord, sommairement, comment s'est eflectuée la conquête militaire
; nous essaierons ensuite d'analyser I'impact colonial ; nous examinerons eizfin comment, à partir des
groupements anciens, ont été constitués les équilibres ?zouveaux.
I. LES GRANDES ÉTAPES DE LA CONQUÊTE MILITAIRE
(domzées sommaires)
La pénétration française (1) en pays guéré et wobé s'est faite à partir des postes de Danané (créé
en 1906) et de Man (crée en 1908), selon trois directions principales, qui furent successivement :
- l'axe Man-Logoualé - Béoué - Duékoué ;
- l'axe Man - Sémien ;
- l'axe Danané - Toulépleu.
Les opérations de pacification furent commencées en 19 11 et poursuivies jusqu'en.1914 selon la
(( méthode d'action lente », dite de la « tache d'huile H, préconisée par le Gouverneur Angoulvant (2j, et
qui consistait à créer des postes fixes à partir desquels des unités mobiles et légères rayonneraient.
A. L'axe Man-Dnékoné
La pénétration du pays guéré se fit à partir du poste de Logoualé, créé le 28 février 19 11. Elle poursuivait
deux objectifs : pacifier, en un premier temps, la zone comprise entre Sassandra et Kô-Nzo, soumettre,
en un second temps, à partir de cette zone pacifiée, les populations entre Nzo et Cavally.
1. PACIFICATION DES POPULATIONS ENTRE SASSANDRA ET KO-NZO
La pénétration du couloir entre Sassandra et Kô-Nzo s'est faite à partir du poste de Logoualé.
« De fortes reconnaissances... explorent d'abord la région du confluent Kô-Nzo et atteignent en fin février
(1) Cf. Gouverneur ANGOULVANT : «La pacification de la côte d'ivoire ». Paris. Larose 1916.
(2) Gouverneur ANGOULVANT, ouvrage cité, page 151. Cette méthode s'opposait au système des «colonnes » qui,
comme le soulignait en 1933 le Capitaine VIARD, dans une monographie non publiée du poste de TouEpIeu, « ne font
que passer et ne laissent derrière elles qu'une soumission de circonstance ».
LA MISE EN PLACE DES POPULATIONS GUÉRÉ ET WOBÉ (FIN)
Juillet 1911
Lutte cent re 185 MANON 'L.
* :
PHASES DE PENETRATION
-m-m + I Mon- Donone' (1906-1908)
,-b 2 Est de Mon et liaison avec le sud (1911)
.-- + 3 Pocificotion du poys GUÉRÉ-NIA0 et
Itinéraire de SAMORY en 1898
7 1908
Poste et dote de SO création
colt*x wadit".P JPPSODlPfn I',I ,, r.prod",,,
PY.C I'oimabl. outor,*.won dl c.1 or.p",*m,
33
FIG. 8. - Pénétration française dans la région de Man
34 Alfred SCHWARTZ
(191 lj Doua-Pin et Douélé. Les Guéré, épars dans la forêt, crient qu'ils ne veulent pas faire la guerre et
en même temps déchargent sur nous leurs fusils. Après ce coup de sonde, le Commandant Bordeaux décide
de porter tous ses efforts sur la rive gauche du Kô, face à Logoualé )) (1).
Une première opération eut pour mission de reconnaître l'emplacement de postes à partir desquels
se ferait la pacification. Le choix porta sur Béoué et Duékoué qui furent créés en 19 11. (( La 8e compagnie
s'installe à Duékoué et Béoué avec mission immédiate de soumettre les Bilas et les Zaniés... Mais l'excessive
sauvagerie des habitants et l'obligation, en septembre, d'envoyer des troupes en Guinée, contrarient
nos efforts et nous empêchent, malgré l'activité déployée de mai à octobre, d'obtenir des résultats décisifs :
il devint indispensable de recourir, en novembre, à une nouvelle action d'ensemble... A Duékoué un essai
de conquête par la persuassion n'a donné aucun résultat x (2).
De novembre 1911 à février 1912, de nombreuses reconnaissances sillonnent le pays à partir de
Béoué et de Duékoué. (( L'envahissement du Zanié, réputé le plus fort de la région, est entrepris de l'Ouest
à l'Est... Les Zanié n'offrent de résistance sérieuse qu'à Glopou (7 février), faillissant ainsi à leur réputation
de bravoure qui ne survivra pas à cet echec » (3).
Mais les opérations de pacification aussi bien en pays Zanié qu'en pays Zagna et Zibiano furent
poursuivies tout au long de l'année 1912.
2. PACIFICATION DES POPULATIONS ENTRE NZO ET CAVALLY
L'effort de pénétration du couloir entre Nzo et Cavally fut mené à la fois à partir du poste de Béoué
et des postes de Duékoué et Guiglo (créé fin 1912).
(( La première reconnaissance, forte de 62 fusils, dirigée vers le Sud, quitte Duékoué le 22 juin sous
le commandement du Lieutenant Lacourière.. . Elle livre de nombreux combats d'embuscade et s'empare
de plusieurs villages fortifiés » (4j. Après cette prise de contact avec le pays Doo, le Lieutenant Lacourière
parcourt les pays Fléo et Glokouion <( où il ne rencontre qu'une faible résistance )) (5).
Les tentatives faites à partir du poste du Béoué furent tout d'abord moins heureuses : (( En septembre
1912, le Capitaine Chrétien s'attaque aux Béou et aux Gao, mais ne peut arriver à prendre le contact
des Guéré de la rive droite du Zô » (6). La même année cependant fut créé, au coeur du pays Zérabaon?
le poste de Dieya. Mais ce n'est qu'en juin et juillet 1923 que furent pénétrés les pays Boo et Néao.
B. L'axe Man-Sémien : pacification du pays mobé
La conquête du pays wobé se fait à la fois à partir du poste de Sémien, créé en juillet 19 11, au Nord-
Est, et du poste de Logoualé au Sud-Ouest. (( L'objectif à atteindre est d'explorer et de soumettre la zone
(1) ANGOULVANT, ouvrage cité, page 365.
(2) ANGOULVANT, ouvrage cité, pages 365 a 367.
(3) ANGOULVANT, ouvrage cité, page 370.
(4) ANGOULVANT, ouvrage citk, page 380.
(5) ANGOULVANT, ouvrage cité, page 382.
(6) ANGOULXANT, ouvrage cité, page 377.
LA MISE EN PLACE DES POPULATIONS GUÉRÉ ET WOBÉ (FIN) 35
comprise entre la route Man-Sémien au Nord, le Sassandra à l'Est, le Zô à l'Ouest et au Nord. Cette zone
est à peu près entièrement inconnue » (1).
Les premiers efforts portent, en 19 11, sur la pacification des groupements voisins de la route Man-
Sémien, en construction. Le 31 août, un chantier de la route est encore attaqué. Mais les populations
riveraines abandonnent rapidement toute résistance.
La pénétration du pays Gbéon commence dès la fin de l'année 1911. « Le pays, relativement peuplé,
a été abandonné ; seuls les guerriers gardent les sentiers et les villages, rendant nécessairesd es combats
plus ou moins violents, notamment à Gouèhia (Glao), Bodrou et Zoodrou (Tao)... )) (1).
En février 1912, la conquête du pays wobé est considérée comme achevée. (( La 2e compagnie
s'installe à Kouibly en attendant l'autorisation d'y créer un poste )) (2).
C. L'axe Danané-Toulépleu : pacification du couloir entre Nuon et Cavally
La zone comprise entre Nuon et Cavally, de Danané à Toulépleu, fut la dernière à être occupée
par le colonisateur. Ce n'est en effet qu'en juillet 1913 qu'un détachement quitte Danané pour se porter
sur Zouan-Hounien, qui est enlevé sans gros efforts. Le 15 août, un peloton du même détachement, sous
les ordres du Lieutenant Liorzou, atteint Toulépleu. La résistance est pratiquement nulle, et les chefs rendent
337 fusils. Le Lieutenant Liorzou Choi&t l'emplacement d'un poste, puis parcourt le pays ((pour activer
la reddition des armes et la soumission complète » (3). A la fin de décembre la région est considérée
comme pacifiée.
4ï:: $
La pénétration des pays guéré et wobé fut donc, somme toute, relativement facile. Elle donna en
tout cas lieu à moins d'effusion de sang que l'occupation de la plupart des autres régions de la Côte
d'ivoire. La pacification achevée, l'organisation administrative pouvait commencer.
II. L'IMPACT COLONIAL
La prise en main du pays par l'autorité coloniale s'accompagne d'un profond bouleversement
des équilibres traditionnels. Les cadres anciens sont remis en cause à la fois sur le plan territorial, par
la création d'unités administratives nouvelles, et sur le plan social, par les déplacements et regroupements
coercitifs de populations.
A. Le découpage administratif
La première tâche entreprise par le colonisateur fut de découper le pays conquis en entités administrativement
viables. Ces entités devaient être de deux ordres :
(1) ANGOULVANT, ouvragec it6,p age3 69.
(2) ANGOULVANT, ouvragec ité,p age3 71.
(3) ANGOULVANT, ouvragec ité,p age3 85.
36 Alfred SCHWARTZ
- à la base des unités calquées sur l'organisation territoriale traditionnelle et régies par l'autorité
politique ancienne ; ces unités furent appelées canfons ;
- coiffant un groupe de cantons, une unité administrative importée, fonctionnant selon des
normes nouvelles et disposant d'un pouvoir d'intervention coercitif : la subdivision.
Ce schéma, qui visait à faire du pouvoir traditionnel l'auxiliaire de l'administration coloniale,
était d'une bonne conception théorique. Mais il ne fut que très peu efficient dans la pratique, faussé qu'il
était dès le départ autant par la méconnaissance qu'avait le colonisateur de la réalité sociale locale que
par la capacité de « tricherie » mise en oeuvre par la société traditionnelle.
1. LE CANTON
La détermination des unités cantonales devait se faire, comme nous l'avons déjà souligné, sur la
base de l'organisation territoriale traditionnelle. Or, cette organisation était non seulement extrêmement
complexe (existence de confédérations guerrières, de groupements de guerre ou d'alliance, de fédérations
d'alliance), mais manquait en plus d'uniformité (les mêmes unités n'étant pas présentes sous la même
forme d'un bout à l'autre du territoire). La délimitation des cantons s'avérait donc de prime abord comme
une tâche difficile. Fut-elle effectivement perçue comme telle par l'administration coloniale ?
Le découpage effectué, s'il tient souvent compte des équilibres traditionnels, nous apparaît cependant
souvent aussi comme parfaitement arbitraire. L'unité cantonale se calque ainsi tantôt sur la confédération
guerrière (exemple : Zagné, Zibiao), tantôt sur le groupement de guerre ou d'alliance (exemple :
Nidrou, Béhoua), tantôt sur la fédération d'alliance (exemple : Glokouion), tantôt sur le simple patriclan
ou lignage majeur (exemple : Zahon, Néao, Fléo, Niaho), et ceci sans justification rationnelle. Il arrive
également qu'un même canton chevauche des confédérations guerrières ou des groupements de guerre
différents : ainsi, en pays wobé, le canton Tao est issu de cinq des six groupements Gbéon, le sixième
(Glao) ayant été rataché, sans raison apparente, au canton Péomé ; de même le canton Péomé a été constitué
à partir de trois des quatre groupements Zoho, le quatrième (Nidrou) ayant été rattaché au canton Tao.
Il est vraisemblable que ce découpage arbitraire soit le fait à la fois de la mauvaise connaissance
qu'avait le colonisateur du jeu des alliances traditionnelles et de l'esprit d'obstruction déployé par la
population. La création de ces unités administratives allait de pair avec la nomination de chefs nouveaux.
Or ces chefs n'étaient jamais les chefs réels qui, eux, se tenaient à l'écart et continuaient à assumer la
réalité du pouvoir (1). Dans ces conditions, peu importait que les cadres nouveaux ne correspondissent
pas aux cadres anciens. Au contraire c'était là accroître les chances d'echec de l'entreprise.
Il est par ailleurs probable également, tel que le souligne Marc ALLUSON, que la résistance opposée
par tel ou tel groupement à la pénétration coloniale ait été à l'origine de son élévation au rang de canton :
(( Au cours de ces luttes de nombreux... Rois ont affirmé leurs qualités. Les efforts des plus hardis ont
malgré leur défaite été couronnés par la constitution en canton des clans qu'ils avaient guidés dans leur
lutte 1) (2).
Il convient enfin d'ajouter que les tractations, pressions et intrigues de tous genres n'ont certes
pas dû manquer de jouer aussi, au niveau des individus, quand il s'est agi, par-delà le découpage territorial,
de reconnaître officiellement à des (( dignitaires traditionnels )) des fonctions relativement importantes.
~- .-
(1) Ce« dualismed u pouvoirp olitique» a étés oulignép arG . BALANDIERd ans « Sociologie actuelle de l'Afrique Noire »,
page6 3.E n paysg uérée t wobé,S UTle s2 0 chefsd e cantona ctuellemenetn exercice(3 étantd écédéest n'ayant pasé tér emplacés)
I,I sont d'anciensm ilitairesr etraitése t 9 seulemensto nt« civils ».
(2) M. ALLUSSON, rapport cité, page 179.
LA MISE EN PLACE DES POPULATIONS GUÉRI? ET WOBÉ (FIN) 31
Quoi qu'il en soit, les données numériques concrétisent le caractère arbitraire du découpage : alors
que le canton Tao compte actuellement 29 350 personnes et le canton Péomé 22 913, le canton Doo en
compte 1 614 et le canton Glokouion 1 149 seulement...
2. LA SUBDIVISION
La majorité des chefs-lieux de subdivision se sont constitués à partir des postes militaires qui servirent
de base aux opérations de pacification. Le choix de leur emplacement cherchait donc davantage
à satisfaire des normes stratégiques qu'à organiser administrativement le pays.
Les remarques faites au sujet de la délimitation des cantons sont donc valables également en ce
qui concerne la subdivision. 11 semble que cette fois-ci, à partir des anciens postes militaires, ce soit le
seul critère géographique qui ait été retenu pour fixer le cadre de la nouvelle circonscription administrative
- le critère ethnique n'ayant joué qu'accessoirement, dans la mesure où toutefois il n'allait pas
à l'encontre du critère géographique. Ainsi, durant toute la période coloniale, l'ensemble du pays guéré
et wobé ressortissait-il aux subdivisions de Toulépleu, Guiglo. Duékoué et Man. De Toulépleu à Guiglo
il y a 120 kilomètres, alors que de Guiglo à Duékoué il n'y en a que 31. Man est même tout à fait en-dehors
du pays wobé. Les chefs-lieux occupent donc tous des positions particulièrement excentriques par rapport
aux circonscriptions qu'ils administrent.
Quant au critère ethnique, s'il fut respecté dans le découpage pour les grandes confédérations
guerrières de l'Est, ce ne fut pas le cas pour l'énorme groupement Zérabaon qui s'étend du Nzo au Cavally.
Celui-ci fut en effet, administrativement, littéralement K écartelé H, les cantons Néao (Nord et Sud) étant
rattachés à Toulépleu, les cantons Zérabaon, Goum-Blao, Zahon, Glokouion à Guiglo, le second canton
Zérabaon à Duékoué et le groupe Guémalé (qui comprend les Zérabaon-Nizoinhikon) à Man.
Cet écartèlement fut encore accentué par la politique de déplacement et de regroupement de populations
entreprises assez rapidement par le colonisateur.
B. Les déplacements et regroupements de populations
Les raisons qui ont amené l'administration coloniale à déplacer et à regrouper des populations
généralement éparses en une multitude de campements à travers la forêt sont, au départ, de trois ordres :
- administratives : fixer la population en des endroits précis afin de pouvoir la contrôler plus
facilement (recensement, levée de l'impôt, etc.) ;
- politiques : faciliter la surveillance et, partant, empêcher la fuite vers le Libéria des populations
frontalières ;
- économiques : constituer des réservoirs de main-d'oeuvre prestataire facilement accessible,
à la fois pour les travaux de construction de routes sur place et l'alimentation en K travailleurs volontaires »
(système des <( engagements ») de la demande extérieure.
Les déplacements et regroupements de populations eurent trois conséquences directes :
- apparition du phénomène-village, au sens d'entité sociale autre que le groupe de descendance
ou la fédération librement consentie de deux ou plusieurs patriclans ; le village de regroupement est
généralement une juxtaposition de communautés claniques hétérogènes, qui vivent côte à côte mais ne
s'interpénètrent pas ;
- mise en place, le long des routes nouvellement créées. d'un peuplement linéaire, qui ne reflète
en rien l'occupation traditionnelle de l'espace, mais est le résultat d'une intervention coercitive. Ainsi les
38 Alfred SCHWARTZ
populations Zérabaon des cantons Néao, Zérabaon, Goum-Blao, Zahon, Glokouion, dont l'habitat
était beaucoup plus septentrional et que rien ne coupait des clans de l'actuel canton Zérabaon de Bangolo,
se sont vues ramener, à partir de 1925, sur le tracé de la future route Guiglo-Toulépleu, dont ils eurent
à assumer les travaux à la fois de construction et d'entretien. 11 en fut de même des groupements Fléo-
Niaho et Daho-Doo qui, à la même époque, furent installés (( manu militari )) sur les bords de la route
Guiglo-Taï ; ou encore des villages des axes Guiglo-Duékoué, Duékoué-Kouibli, ou Duékoué-Guessabo ;
- accentuation du mouvement d'exode amorcé au moment de la pénétration coloniale par les populations
vers le Libéria : en 1933, dans son ouvrage (( Les Guéré, peuple de la forêt )), René Viard chiffre
(( à plus de 15 000 les Guéré ayant fui la Côte d'ivoire » (1).
Ce brassage de populations fut le principal facteur d'éclatement des cadres sociaux traditionnels.
C. L'éclatement des cadres anciens
Nous avons vu que les unités socio-spatiales traditionnelles reflétaient une organisation sociale
de type militaire. L'équilibre entre groupements était le résultat d'un jeu d'alliances soigneusement entretenues.
La pénétration coloniale, en faisant disparaître le (( warfare )), entraîne donc du même coup l'éclatement
des cadres qui servaient de fondements à l'équilibre social traditionnel, et dont l'existence ne se
justifie, dorénavant plus : confédération guerrière, groupement de guerre ou d'alliance, fédération d'al-
1ia nce.
La confédération guerrière non seulement ne joue plus actuellement aucun rôle fonctionnel, mais
a pratiquement disparu même en tant que cadre de référence. Ainsi, en pays wobé par exemple, rares
furent nos informateurs capables d'évoquer simplement l'existence des confédérations Gbéon et Zoho.
En pays guéré par contre, il semble que la confédération guerrière, ou le groupement de guerre et d'alliance
continuent à demeurer l'aire privilégiée de l'échange matrimonial. Quant à la fédération d'alliance
elle n'a plus que rarement une existence propre.
Le patriclan (tks) lui-même n'a pas été à l'abri de ces bouleversements. Les déplacements et regroupements
de populations notamment ont contribué à son éclatement géographique et à sa fragmentation
en unités lignagères relativement autonomes : les unu ou gnu.
La proclamation, en 1960, de l'Indépendance et la mise en place d'autorités administratives nouvelles,
n'ont en rien modifié le processus de désagrégation des cadres sociaux traditionnels entamé par
la conquete coloniale. Au contraire, en reprenant avec une vigueur accrue la politique de regroupement
des villages, le pouvoir actuel a accéléré le mouvement en cours. Parallèlement, mais toujours sur la base
des unités cantonales définies par le colonisateur, les autorités nouvelles ont tenté de procéder à un
redécoupage administratif, se traduisant par la substitution aux anciennes subdivisions, peu nombreuses
et aux chefs-lieux excentrés, de Sous-Préfectures, plus nombreuses et mieux « équilibrées 1).
(1) CapitaineR ené VIARD : « Les Guéré, peuple de la forêt ». Société d'éditions géographiques, maritimes et coloniales.
Paris 1934, p. 29.
LA MISE EN PLACE DES POPULATIONS GUÉRÉ ET WOBÉ (FIN) 39
III. LES ÉQUILIBRES NOU?/EAUX
Notre propos sera d'examiner maintenant comment, sur la base des unités sociales traditionnelles
réelles, telles que nous les avons dégagées et définies dans la partie de ce travail consacrée à la mise en
place du peuplement, s'est effectué le découpage administratif tel qu'il existe actuellement. En d'autres
termes, les unités administratives actuelles (cantons ou Sous-Préfectures) reproduisent-elles les unités
sociales anciennes ?
Pour la clarté de l'exposé nous reprendrons le plan adopté ci-dessus pour l'étude de la mise en place
du peuplement. Nous distinguerons donc successivement :
- les groupements anciens et l'organisation administrative actuelle du pays wobé ;
- les groupements anciens et l'organisation administrative actuelle du pays guéré.
A. Groupements anciens et organisation administrative actuelle du pays wobé
Nous avons vu que l'actuel pays wobé était autrefois constitué de trois confédérations guerrières,
Gbéon, Zoho et Baon, auxquelles s'ajoutait un micro-groupement, établi sur le territoire des Zoho. les
Zouagnon.
Le découpage administratif effectué par le colonisateur tint, en gros, compte des équilibres traditionnels.
Le pays wobé fut divisé en trois cantons :
- le canton S&ien, qui reproduit exactement la confédération Baon ;
- le canton Péomé, qui comprend :
trois des quatre groupements ZO~O (Péomé, Pléhou, Saho) ;
le groupement Zouagnon ;
un groupement Gbéon (Glao) ;
- le canton Tao, qui est formé de :
cinq des six groupements Gbéon (Gbéan, Kouao! Tao> Tébao, Kirou) ;
un groupement Zoho (Nidrou).
Mise à part la permutation entre groupements Nidrou et Glaos qui ne peut s'expliquer que par la
méconnaissance qu'avait l'administration coloniale de la structure exacte des alliances anciennes, les
cantons Péomé et Tao reproduisent donc pour l'essentiel les confédérations Zoho et Gbéon.
Depuis 1962 les cantons Sémien et Péomé constituent la Sous-Préfecture de Fakobly, et le canton
Tao la Sous-Préfecture de Kouibly.
B. Groupements anciens et organisation administrative actuelle du pays guéré
1. LES GROUPEMENTS ENTRE SASSANDRA ET Ko-Nzo
a - La confédération Zibiao
- L'unité du groupement Zibiao fut reconnue dès le début par le colonisateur qui érigea la confédération
en canton. Ce n'est qu'en 1943 que le pays Zibiao fut scindé en deux, par la création du canton
40 Alfred SCHWARTZ
Tahouaké, qui amputait l'ancienne confédération de ses groupements les plus orientaux : Zibiao et Tahouaké.
- L'ancienne confédération Zibiao forme donc actuellement deux cantons :
le canton Zibiao, qui comprend les groupements Niaho, Goléo, Glaon. Séhou et Tièméo ;
le canton Tahouaké, qui comprend les groupements Zibiao et Tahouaké.
- La division, en 1943, du pays Zibiao en deux cantons, ne fit en somme que reproduire la distinction
qui existait autrefois déjà entre Zibiao-Zoinhi (actuel canton Zibiao) et Zibiao-Kwéa (actuel
canton Tahouaké).
- Les cantons Zibiao et Tahouaké relevèrent jusqu'en 1964 du commandement de Duékoué.
Ils ressortissent depuis à la Sous-Préfecture de Bangolo.
b - La confédération Zagné
- La confédération Zagné constitue l'un des rares groupements guéré dont l'originalité et l'intégrité
territoriale aient toujours été respectées. Le pays Zagné, qui comprend les groupements Sebahon,
Tkénien, Vahon-Djimahon, Gbowon et Debohon, fut érigé dès le début de la pénétration coloniale en
canton et relève, depuis, de l'administration de Duékoué.
c - La conjëdératiort Zagna
- L'ancienne confédération Zagna fut scindée par l'administration coloniale en deux cantons :
le canton Zagna, comprenant les groupements Bilou et Guéo ;
le canton Duékoué-Central, comprenant les groupements Séhou, Tièmesson, Tiètan et
Blaon.
- Jusqu'en 1964 les deux cantons ressortirent d'abord à la Subdivision, ensuite à la Sous-Préfecture,
de Duékoué. La création de la Sous-Préfecture de Bangolo fit passer le canton Zagna sous l'autorité
de cette nouvelle circonscription, alors que le canton Duékoué-Central continue à relever du commandement
de Duékoué.
d - Le groupement Zaha
- Nous avons vu que les Zaha se faisaient appeler par leurs voisins Zaké. L'administration
coloniale retient ce terme et crée, en un premier temps, le canton Zaké. Mais en 1918 une dernière « guerre ))
met aux prises Zaha et Kouzié. De nombreux Kouzié sont massacrés, et les Zaha, craignant la réaction
de l'autorité militaire, s'enfuient en masse au Libéria. Sur les douze clans trois seulement restent en Côte
d'ivoire : Blao, Paokon et Zouokon. L'administration crée alors, en un second temps, le canton Blao.
Dès 1920 cependant les fugitifs reviennent. L'ancien. canton est alors, en un troisième temps, reconstitué,
mais portera le nom de Zaké-Blao.
- Le canton Zaké-Blao relève de l'autorité de Guiglo.
En ce qui concerne les groupements entre Sassandra et Kô-Nzo, le découpage administratif a
donc, d'une façon générale, respecté les cadres anciens. Seule la confédération Zagna a été scindée arbitrairement
en deux cantons, relevant depuis 1964 de commandements différents.
LA MISE EN PLACE DES POPULATIONS GUÉRÉ ET WOBÉ (FIN) 41
La mise en place des structures administratives nouvelles s'est par contre faite d'une façon bien
moins heureuse entre Nzo et Cavally.
2. LES GROUPEMENTS ENTRE Nzo ET CAVALLY
a - La cotzjëdération Zérabaon
- L'entité Zérabaon est de tous les groupements guéré celle qui a été la plus affectée, dans son
intégrité à la fois physique et humaine, par la mise en place de l'appareil administratif nouveau. L'ancienne
confédération a été fragmentée en pas moins de sept cantons différents (Néao-Blao Nord, Néao-Blao Sud,
deux cantons Zérabaon, Goum-Blao, Zahon, Glokouion), auxquels vient encore s'ajouter le groupe Guémalé
(canton Blouno de la Sous-Préfecture de Logoualé). Les populations de six cantons sur les sept
se sont, en plus, vues arracher de leur contexte spatial traditionnel, pour être amenées de force au bord
du nouvel axe routier Guiglo-Toulépleu, les groupements du septième canton se trouvant dorénavant
complètement coupés de leurs voisins du Sud.
- Le découpage administratif du bloc Zérabaon, tel qu'il fut effectué par le colonisateur, ne repose
a priori sur aucune donnée objective. L'unité ancienne retenue pour déterminer le cadre cantonal est
tantôt la fédération d'alliance (exemple : Goulée-Kouliaon), tantôt le clan (Blao, Zahon), tantôt même
le patrilignage majeur (N&o Nord et Sud). En ce qui concerne les deux cantons Zérabaon par contre,
le cadre de référence est entièrement nouveau : il s'agit d'un regroupement de clans qui au départ n'avaient
entre eux aucune affinité particulière.
- On pourrait croire que ce soit la prise en considération du facteur démographique qui ait donné
lieu à ce découpage, l'administration ayant à coeur de créer des entités numériquement équilibrées. 11
n'en fut apparemment rien. Les effectifs actuels des cantons varient en effet de 7 678 individus pour le
plus peuplé (canton Zérabaon de Bangolo) à 1 149 pour le moins peuplé (canton Glokouion).
- Les vicissitudes que subit l'ancienne confédération Zérabaon eurent enfin de fâcheuses conséquences
sur le plan administratif. Les différents cantons se virent rattachés au commandement de Toulépleu
(Néao-Blao Nord et Sud), de Guiglo (Zérabaon, Goum-Blao, Zahon, Glokouion), de Duékoué
(Zérabaon du Nord) et même de Man (groupe Guémalé). Ces mêmes cantons ressortissent actuellement
aux Sous-Préfectures de Blolequin (Néao-Blao Nord et Sud, Zérabaon), de Guiglo (Goum-Blao, Zahon,
Glokouion), de Bangolo (Zérabaon du Nord) et de Logoualé (groupe Guémalé).
- La confédération Zérabaon fut donc littéralement (( écartelée )), comme nous l'avons déjà
souligné ci-dessus, par la mise en place des structures nouvelles.
b - Les groupements Boo et Gbao
- L'intégrité du groupement Boo fut respectée par le découpage administratif. Le nouveau canton
releva jusqu'en 1966 de l'autorité de Toulépleu, et ressortit, depuis, à la Sous-Préfecture de Blolequin.
- Quant au groupement Gbao, l'administration coloniale en fit un canton, qui cessa d'exister
une première fois en 1916, avec la fuite de ses ressortissants au Libéria, revit le jour en 1925 avec leur
retour, et disparut une seconde fois en 1930, quand les Gbao refranchirent le Cavally, cette fois-ci définitivement.
c - Les groupements Fléo- Niaho et Daho-Doo
- Le groupement Fléo-Niaho fut scindé par l'administration coloniale en deux cantons distincts.
Le canton Fléo relève actuellement de l'autorité de Guiglo, alors que le canton Niaho a été rattaché à
la Sous-Préfecture, nouvellement créée, de Taï.
42 Alfred SCHWARTZ
- Le groupement Daho-Doo fut également divisé en deux cantons distincts. Mais le canton
Daho disparut en 1926 avec la fuite de ses ressortissants au Libéria. Le canton Duo est sous le commandement
de Guiglo.
Si, entre Nzo et Cavally, les cadres anciens ont donc été respectés pour les groupements Boa,
Fléo-Niaho et Daho-Doo le découpage administratif s'est par contre effectué d'une manière tout à fait
fantaisiste en ce qui concerne la confédération Zérabaon. II est vraisemblable que la position géographique
du pays Zérabaon, loin de tout axe de pénétration traditionnel, et aussi difficilement accessible de l'Est et
de l'Ouest que du Nord et du Sud, n'a favorisé ni la connaissance précise, ni la constitution par le colonisateur
d'unités administratives homogènes. Cette situation fut encore aggravbe par le déplacement
coercitif de la plupart des groupements sur les bords de l'axe Guiglo-Toulépleu. Alignées en une succession
de villages, sur un front de près de 80 kilomètres de large, les populations Zérabaon pouvaient difficilement,
dans leur contexte spatial nouveau, faire l'objet d'un découpage rationnel.
3. LES GRouPEhwm ENTRE CAVALLY ET NUON
a - Le groupement Nidrou
Le cadre cantonal qui se substitua au groupement de guerre Nidrou respecta en gros les frontières
traditionnelles. La limite occidentale du nouveau canton fut toutefois fixée au Cavally, amputant l'ancien
groupement des villages situés sur la rive droite du fleuve.
b - Le groupement Béhoua
Le groupement Béhoua, auquel furent rattachés les villages Nidrou de la rive droite du Cavally,
devint le canton Toulépleu.
c - Les groupements Welao et Mao
L'ancien groupement Welao et ce qui restait en Côte d'ivoire, après la période de pacification.
du clan Mao, donnèrent naissance au canton Bakoubli. Le cadre du nouveau canton, dont la limite orientale
s'arrêtait au Cavally, s'agrandit en 1930 d'une fraction du territoire Gbao, après le passage de ce dernier
groupement au Ljbéria.
La personnalité des groupements anciens fut donc assez fidèlement respectée en ce qui concerne
les populations Nidrou, Béhoua et Welao. Les trois cantons qu'elles constituent, Nidrou, Toulépleu et
Bakoubli, relèvent de l'autorité de Toulépleu.
F LÉO
l Chef-lieu de Sous-Préfecture
- Limite de Sous-Préfecture
- Limite de Canton 1 \
_-_-- Cours d'eau
7 Route Principale
1 , Ec~el'e, , "p km
FkL 9. - Le pays gu6r6 et wobé, carte administrative.
LA MISE EN PLACE DES POPULATIONS GUÉRÉ ET WOBÉ (FIN) 43
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FIG. 10. - Le pays wé, groupements traditionnels.
44 Alfred SCHWARTZ
D'une manière synthétique la création des circonscriptions administratives nouvelles, à partir
des équilibres anciens, s'est donc faite de la manière suivante :
A. Pays wobé
1. SOUS-PRÉFECTURE DE FAKOBLY
Canton Sémien : ancienne confédération Baon, comprenant les groupements Sémien, Wéhia,
Koua et Blaon.
Canton Péomé, comprenant :
trois des quatre groupements de l'ancienne confédération Zoho : Péomé, Pléhou, Saho ;
un groupement de l'ancienne confédération Gbéon : Glao ;
le groupement Zouagnon.
2. SOUS-PRÉFECTURE DE KOUIBLY
Canton Tao, comprenant :
cinq des six groupements de l'ancienne confédération Gbéon : Gbéan, Kouao, Tao, Tebao,
Kirou ;
un groupement de l'ancienne confédération Zoho : Nidrou.
B. Pays guéré
1. SOUS-PRÉFECTURE DE BANGOLO
Canton Zibiao : ancienne fédération Zibiao-Zoinhi, comprenant les groupements Niaho, Goléo,
Glaon, Séhou et Tièméo ;
Canton Tahouaké : ancienne fédération Zibiao-Kwéa, comprenant les groupements Zibiao et
Tahouaké ;
Canton Zagna : formé de deux des six groupements de l'ancienne confédération Zagna : Bilou
et Gué0 ;
Canton Zérabaon : comprenant les groupements Gbéou, Tkinho-Gao et Kouahi-Djao de l'ancienne
confédération Zérabaon.
2. SOUS-PRÉFECTURE DE LOGOUALÉ
Canton Blouno, comprenant le groupe Guémalé, composé :
du groupement Guéré-Zérabaon des Nizoinhikon ;
du groupement Dan des Manbahon.
3. SOUS-PRÉFECTURE DE DUÉKOUÉ
Canton Zagné : ancienne confédération Zagné, comprenant les groupements Sebahon, Tkènien,
Vahon-Djimahon, Gbowon et Debohon ;
LA MISE EN PLACE DES POPULATIONS GUÉRÉ ET WOBÉ (FIN) 45
Canton Duékoué-Central : comprenant quatre des six groupements de l'ancienne confédération
Zagna : Séhou, Tièmesson, Tiètan et Blaon.
4. SOUS-PRÉFECTURE DE GUIGLO
Canton Zaké-Blao : ancien groupement Zaha.
Canton Glokouion : ancienne fédération d'alliance Gouléo-Kouliaon de la confédération Zérabaon.
Canton Zahon : clan Zahon de l'ancienne confédération Zérabaon.
Canton Goum-Blao : clan Blao de l'ancienne confédération Zérabaon.
Canton Fléo : lignage majeur Pléo du clan Djédi (groupement Fléo-Niaho).
Canton Doo : groupement Doo de l'ancienne fédération d'alliance Daho-Doo.
5. SOUS-PRÉFECTURE DE TAI
Canton Niaho : lignage majeur Niaho du clan Djédi (groupement Fléo-Niaho).
Canton Taï, comprenant un village Daho, de l'ancien groupement d'alliance Daho-Doo.
6. SOUS-PRÉFECTURE DE BLOLEQIJIN
Canton Zérabaon : comprenant les fédérations d'alliance et clans Baébo-Guiriaon, Tja-Gbao,
Gbéo et Gouého de l'ancienne confédération Zérabaon.
Canton Néao-Blao Nord : groupe Zohouokon du clan Néao de l'ancienne confédération Zérabaon.
Canton Néao-Blao Sud : groupe Boonéao du clan Néao de l'ancienne confédération Zérabaon.
Canton Boo : ancien groupement Boo.
7. SOUS-PRÉFECTURE DE TOULÉPLEU
Canton Nidrou : ancien groupement Nidrou.
Canton Toulépleu : ancien groupement Béhoua.
Canton Bakoubli : anciens groupements Welao et Mao.
APPENDICE : ETAT ACTUEL DES POPULATIONS GUÉRÉ ET WOBÉ
Population totale : 197 694
Sources : recensements administratifs de :
1963 pour la Sous-Préfecture de Duékoué, le canton Doo de la Sous-Préfecture de Guiglo, quatre
villages du canton Niaho de la Sous-Préfecture de Taï (Vodélobly, Tienkoula, Zaipobly,
Gahably) et le canton Zérabaon de la Sous-Préfecture de Blolequin ;
1965 pour la Sous-Préfecture de Guiglo (moins le canton Doo) et les villages guéré de la Sous-
Préfecture de Taï (moins les quatre villages cités ci-dessus du canton Niaho) ;
46 Alfred SCHWARTZ
1966 pour les Sous-Préfectures de Kouibly, Toulépleu et les cantons Néao-Blao Nord, Néao-Blao
Sud et Boo de la Sous-Préfecture de Blolequin ;
1967 pour les Sous-Préfectures de Fakobly, Bangolo et le groupe Guémalé.
Nous présenterons, par souci de clarté, les données relatives à l'état actuel des populations guéré
et wobé de la manière suivante :
1. Tableau d'ememble
- répartition de la population par groupements traditionnels.
- répartition de la population par Sous-Préfectures et cantons.
II. Tableau de détail: répartition de la population par groupements traditionnels et par villages.
1. TABLEAU D'ENSEMBLE
Répartition de la population par groupements traditionnels
A. POPULATION WOBÉ : 56 515
1. Gbéon ......................................................... 27 709
Gbéan ...............................................................
Kouao ...............................................................
Tao ..................................................................
Tebao ................................................................
Kirou .................................................................
Glao .................................................................
2. Zoho .......................................................... 23 773
Péomé ...............................................................
Pléhou ...............................................................
Saho .................................................................
Nidrou ...............................................................
3. Baon ........................................................... 4 252
Sémien ................................................................
Koua ................................................................
Blaon ................................................................
Wéhia ................................................................
4. Zouagnon ...................................................... 781
B. POPULATION GUÉRÉ : 141 179
8 082
2 679
3 719
2 665
4 688
5 876
6 368
4 696
5 192
7 157
1 900
1 645
294
413
1. Zibiao ._.............._.........._........._,.................. 19 255
LA MISE EN PLACE DES POPULATIONS GUÉRÉ ET WOBÉ (FIN) 41
a - Zibiao-Zoinhi
Niaho ................................................................ 1 459
Goléo ................................................................ 3 843
Glaon ................................................................ 2 446
Sehou ................................................................ 574
Tièméo ............................................................... 3 865
b - Zibiao-Kwéa
Zibiao.. ..............................................................
Tahouaké .............................................................
2. Zagné ........................................................... 16 783
Sebahon ..............................................................
Tkènien ..............................................................
Vahon-Djimahon .......................................................
Gbowon.. ............................................................
Debohon .............................................................
3. Zagna .......................................................... 27 976
Bilou .................................................................
Guéo ................................................................
Sehou ................................................................
Tièmesson ............................................................
I Tiètan ................................................................
Blaon ................................................................
4. Zaha ........................................................... 8 262
5. Zérabaon ....................................................... 30 920
Gbéou ...............................................................
3 740
3 328
2 809
3 260
1 002
4 944
4 768
13 112
2 570
456
1 217
1 754
8 867
3 512
2 741
1 425
4 173
2 165
1 946
1 149
Tkinho .................
Kouahi-Djao ............
Baébo-Guiriaon, Tja-Gbao
Blao ...................
Zahon ..................
.............................................
.............................................
Gbéo, Gouého (canton Zérabaon de Blolequin)
.............................................
.............................................
Gouléo-Kouliaon . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Néao
Zohouokon .......................................................... 4 772
Boonéao.. .......................................................... 6 615
Guémalé-Nizoinhikon .................................................. 2 422
6. Boo ........................................................... 5 234
7. Fléo-Niaho...............: ...................................... 5 332
Fléo .................................................................
Niaho ................................................................
2 079
3 253
48 Alfred SCHWART'Z
8. Daho-Doo . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 856
Daho (un seul village, Ponan) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Doo
242
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 614
9. Nidrou . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9 650
10. Béhoua . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12 012
11. Welao . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 199
12. Mao . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 700
Répartition de la population par Sous-Préfecture et cantons
A. POPULATION WOBÉ
1. Sous-Préfecture de Fakobly : 27 165
Canton Sémien : groupements Sémien, Koua, Blaon et Wéhia de l'ancienne confédération
Baon : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4 252
Canton Péomé : groupements Péomé, Pléhou et Saho de l'ancienne confédération
Zoho ; groupement Glao de l'ancienne confédération Gbéon ; groupement Zouagnon : . . . . . 22 913
2. Sous-Préfecture de Kouibly : 29 350
Canton Tao : groupements Gbéan, Kouao, Tao, Tebao et Kirou de l'ancienne confédération
Gbéon ; groupement Nidrou de l'ancienne confédération Zoho : . . . . . . . . . . . . . . . 29 350
B. POPULATION GUÉRÉ
1. Sous-Préfecture de Bangolo : 42 615
Canton Zibiao : groupements Niaho, Goléo, Glaon, Sehou et Tièméo de l'ancienne
fédération Zibiao-Zoinhi : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Canton Tahouaké : groupements Zibiao et Tahouaké de l'ancienne fédération Zibiao-
Kwéa : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Canton Zagna : groupements Bilou et Guéo de l'ancienne confédération Zagna : . . . .
Canton Zérabaon : groupements Gbéou, Tkinho-Gao et Kouahi-Djao de l'ancienne
confédération Zérabaon : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
12 187
7 068
15 682
7 678
2. Sous-Préfecture de Logoualé : 2 422
Canton Blouno : groupement Niz.oinhikon du groupe Guémalé : . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2 422
3. Sous-Préfecture de Duékoué : 29 077
Canton Zagné : groupements Sebahon, Tkènien, Vahon-Djimahon, Gbowon et Debohon
de l'ancienne confédération Zagné : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16 783
LA MISE EN PLACE DES POPULATIONS GUÉRÉ ET WOBÉ (FIN) 49
Canton Duékoué-Central : groupements Sehou, Tièmesson Tiètan et Blaon de l'ancienne
confédération Zagna : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12 294
4. Sous-Préfecture de Guiglo : 17 215
Canton Zaké-Blao : ancien groupement Zaha : . . . . . . , . . . . . . . . . , . . , . . . . . . . . . . . . . .
Canton Glokouion : ancienne fédération Goulée-Kouliaon de la confédération Zérabaon
: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Canton Zahon : clan Zahon de l'ancienne confédération Zérabaon : . . . . . . . . . . . . . . .
Canton Goum-Blao : clan Blao de l'ancienne confédération Zérabaon : . . . . . . . . . .
Canton Fléo : lignage majeur Fléo du clan Djédi (groupement Fléo-Niaho) : . . . . . . . .
Canton Doo : groupement Doo de l'ancienne fédération Daho-Doo : . . . . . . . . . . . . _
8 262
1 149
1 946
2 165
2 079
1 614
5. Sous-Préfecture de Taï : 3 495
Canton Niaho : lignage majeur Niaho du clan Djédi (groupement Fléo-Niaho) : . . . . . 3 253
Canton Taï : un village Daho de l'ancien groupement d'alliance Daho-Doo : . . . . . . . 242
6. Sous-Préfecture de Blolequirz : 20 794
Canton Zérabaon : fédérations d'alliance et clans Baébo-Guiriaon, Tja-Gbao, Gbéo
et Gouého de l'ancienne confédération Zérabaon : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Canton Néao-Blao Nord : groupe Zohouokon du clan Néao de l'ancienne confédérationzérabaon
: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Canton Néao-Blao Sud : groupe Boonéao du clan Néao de l'ancienne confédération
Zérabaon : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Canton Boo : ancien groupement Boo : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
4 173
4 772
6 615
3 899
1. Sous-Préfecture de Toulépleu : 23 157
Canton Nidrou : villages de la rive gauche du Cavally de l'ancien groupement Nidl-
ou : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Canton Toulépleu : ancien groupement Béhoua, plus villages de la rive droite du Cavally
de l'ancien groupement Nidrou : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Canton Bakoubli : ancien groupement Welao, plus un village Mao : . . . . . . . . . . . . . . .
7 260
11 998
3 899
II. TABLEAU DE DÉTAIL : RÉPARTITION DE LA POPULATION PAR GROUPEMENTS
TRADITIONNELS ET PAR VILLAGES.
A. POPULATION WOBÉ
1. Confédération Gbéolt
a - Gbéan
Kouibly . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Batiébly . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Nouahé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Kinklo . . , . . . . . . . . . . . . . . . . .
1 988
1 031
441
1 285
Kessably ...................
Kéhiténably ................
Touandrou .................
Piébly ......................
954
1 156
829
398
50 Alfred SCHWARTZ
b - Kouao e - Kirou
Keissérably ............. 397
Tacourably ............. 441
Tobly ................. 225
Gbeibly ................ 308
Ouyably ................ 1 308
c-Ta0
Ouonséa ................
Siébly .................
Tuého .................
Makaébly ..............
Poumbly ...............
Koulaéré ...............
Taobly ................
Douègbé ...............
d - Tebao
Datouzon .........
Nanadrou .........
Nénady . . . . . . . . . . .
2. Confédération ZO~O
a - Péomé c - Saho
Siabli-Tiéhiné ...
Zé.. ...........
Gbadrou .......
Ziondrou ......
Kéadrou .......
Béhoué .........
b - Plého II d - Nidrou
. . .
. . .
. . .
. .
. .
261
577
193
764
468
303
587
566
Sandrou . . . . . . . . . . .
Mahébly . . . . . . . . . .
Tesson . . . . . . . . . . . .
Tiédrou 1-Koléa . . .
Kébly . . . . . . . . . . . .
Tiédrou II (Domibly)
Tohotrodrou . .
Baou . . . . . . . .
Touandrou . . .
Guinglo-Ville .
Nénady . . . . _ .
Kézon . . . . . . .
558
1 283
824
........... 1 438 Fakobly . , . . . . .
........... 1 092 Kontrou . . . . . . . .
........... 789 Bodrou . . . . . . . . .
........... 887 Tiessan . . . . . . . . .
........... 500 Souébly . . . . . . . .
........... 1 662 Kaokossably . . . .
. . .
. . .
. . .
. . .
. . .
. . .
I . . . . . .
......
......
......
......
......
f - Glao
Kloplou . . . . . . . .
Douédy-Souakpé .
Séambly . . . . . . . . .
Kiriao-Gbézio . . . .
Takouaébly . . . . . .
Mangouébly . . . . .
Guézon . . . . . . . . .
. . 1 173
* . 911
. . 672
. . 1 425
. . 228
. . 287
Nidrou . . . . .
Piandrou . . .
Sahidrou . . .
Oulayably . .
Pané . . . . . .
Diotrou . . . .
Trokpadrou
. .
. .
. .
. .
. .
. . . . .
. . . . .
. . . . .
. . . . .
. . . . . .
1 788
547
1 040
398
619
296
314
617
789
1 095
1 167
362
722
. . 1 319
. . 864
. . 547
. . 858
. . 1 062
. . 542
....... 2 460
....... 768
....... 1 022
....... 263
....... 449
....... 767
....... 1 788
LA MISE EN PLACE DES POPULATIONS GUÉRÉ ET WOB,? (FIN) 51
3. Colzfédération Baon
a - Sémien
Sémien ....................
Bibitta .....................
Siambly ....................
b - T<oua
Klangbolably ...............
Flansobly ...................
Koua ......................
4. Groupement Zouagnon
ZZoouuaattttaa II1 . . . . . . . . . . . . . . . . .
1
B. POPULATION GUÉRÉ
1. Confédération Zibiao
- Fédération Zibiao-Zoinhi
a - Niaho d - Sehou
Kahy ...................... 317
Diéou ...................... 597
Pona ....................... 545
b - Goléo
Blédy ...................... 180
Diapléan, ................... 850
Goya ...................... 251
Gaoya ..................... 343
Béoué ...................... 1 051
Gloplou .................... 1 168
c - Glaon
Zéo ........................
Douandrou 1 et II ...........
Goénié .....................
1 200
360
340
450
645
550
781
1 327
501
618
c - Blaon
Tiébly...................... 294
d - Wéhia
Taobly . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 200
Kanébly . . . . . . . , . . . . . . . . . . . . 213
Béhoua .....................
Kouisra ....................
e - Tièméo
Gohouo ....................
Plohouin ...................
Guiri ......................
Diourouzon .................
Diaondi ...................
Guekpé ....................
Ziondrou-Zibo .............
229
345
530
134
541
541
639
763
717
52 Alfred SCHWARTZ
- Fédération Zibiao-Kwéa
a - Zibiao b - Tahouaké
Diéouzon ...............
Baibly .................
Douékpé ...............
Goenié .................
. . . 1 461
. . . 951
. . . 575
, . . 571
Sebazon . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Bléni-Mé-Ouin-Zaoudrou . . . . .
Diébly . . . . . . . , . . . . . . . . . . . . .
Guézon . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Bangolo . . . . . . . . . . . . . . . . . . . _
Guinglo . . . . . . . . , . . . . . . . . . .
2. Confédération Zagné
a - Sebahon d - Gbowo
Gnéhiébli . . . . . . . , . . . . . . . . . , . 1 015
Diéhiba . . . . . . . . . . . . . . .._... 1 091
Bahé....................... 703
b - Tkènien
Nidrou.. ...................
Bagohouo .................
Yrouzon ...................
Guinglo-Zia ................
Blodi ......................
- Sroé-Bahon
Guinglo . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Gazon......................
- Kpahon-Béhikon
Diahouin . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Baoubli . . . . , . . . . . . . . . . . , . . .
c - Vahon-Djimahon
Ponan......................
Sibabli . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
452
678
e - Debohon
1 396
734
412
590
Guessabo ...................
Tien-Oula ..................
Ponan-Ouinlo ...............
Guézon ....................
Nanandi ....................
Bangolo ....................
Niambli ....................
Toazéo .....................
3. Confédération Zagna
a - Bilou
Bangolo ................
Bangolo-Kaen ...........
Gouégui ................
Guinglo ................
Béhoué .................
Guézon ................
Séba ...................
Péhai ..................
Yabli-Guinglo ...........
Petit-Pin ...............
Grand-Pin ..............
Yabli-Gué ..............
. . .
. . .
. . .
. . .
. . .
. . .
. . .
. . .
. . .
. . .
2 003
213
1 514
424
1 335
360
448
353
451
136
1 218
562
Guéhouo ..........
Gohouo ...........
Glodé .............
Tié-Iné ............
b - Guéo
Da-Béan-Gohouo . .
Kahen . . . . . . . . . . . .
c - Sehou
Guiglo . . . . . . . . . . . .
......
......
......
......
......
......
......
182
528
582
664
553
1 001
451
1 083
1 134
1 031
1 245
221
317
281
1 189
407
534
907
912
1 163
2 339
358
235
2 040
530
456
LA MISE EN PLACE DES POPULATIONS GUÉRÉ ET WOBÉ [FIN) 53
d - Tièmesson f - Blaon
Diourouzon . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 217 Duékoué ...................
Petit-Duékoué ...............
Guitrouzon .................
Dahoua ....................
Bahé .......................
Pinhou .....................
Glaou ......................
e - Tiètan
Fengolo . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 754
4. Groupement Zaha
Guiglo ...............
Yaoudé .............
Goya ................
Mona-Goulégui .......
5. Confédération Zérabaon
a - Gbéou d - Baébo-Guiriaon, Tja-Gbao,
Banguiéhi .
Kahin . . . .
Tié-Iné . . . .
Koulouan .
Pinhou . . . .
Gloubli . . .
b - Tkinho-Gao
- Tkinho
Phing-Béoua . . .
zou . , , . . . . . . .
- Gao
Gohouo . . .
Zodri . . . . .
Diédrou . . .
c - Kouahi-Djao
Zérégbo . . . . . . . . . 400
Gan . . . . . . . . . . . . 212
Koulaoué . . . . . . . . 250
Babli . . . . . . . . . . . . 563
. . .
. . .
. . .
. . .
. . .
. .
. . . .
. . . .
...... 3 902
...... 491
...... 411
...... 962
. . . . .
. * . . .
. . . . .
. . . . .
. . . . .
. . . . .
. . . . . 522
. . . . . 231
. . 9 . . 724
537
936
313
694
683
350
643
621
5 182
638
595
417
749
989
297
Domobly . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Zouan . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Nédrou . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Glopaoudy . . . . . . . . . . . . . . . . .
926
890
236
444
Gbéo, Gouého
Zéaglo .....................
Zig10 .......................
Béoué ......................
Douandrou .................
Pohan ......................
Guéya .....................
1 708
532
685
410
319
519
e - Blao
Zébly ...................... 546
Douédy .................... 483
Bédy-Goazon ............... 1 136
f - Zahon
Guinkin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Kaadé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Guézon . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
673
881
392
g - Gouléo-Kouliaon
Niouldé . . . . . , . . . , . . . , . . . . . . . 572
Béoua...................... 577
54 Alfred SCHWARTZ
k - Néao
- Zohouokon
Blolequin . . . . . . . . . . . . . . . . . _ . 1 462
Diouya-Dokin . . . . . . . . . . . . . . 1 079
Goya . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 076
Yoga . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 155
i - Nizoinhikon (Guémalé)
Tontigouiné . . . . . . . . . . . . . . . . . 840
Blotilé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 027
Gouétilé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 166
Tyonlé...................... 389
6. Groupement Boo
Keibli ......................
Médibli ....................
Diboké .....................
Tinhou .....................
Kaodguézon .................
1 007 Tuambli-Dedjan ......
515 Petit-Guiglo . . . ......
1 139 Zouhou . . . . . . . ......
940 Zilabli-Douébli . ......
227 Oulataibli . . . . . ......
7. Groupement Fléo-Niako
a - Fléo
Léona ......................
Kridy ......................
Zro ........................
Troya ......................
440
281
549
809
8. Gloupentent Daho- Doo
a - Daho
Ponan...................... 242
- Boonéao
Blédi-Diéya .
Pohan . . . . . .
Doké . . . . . .
Ganhia . . . . .
Zompleu . . .
Diéya . . . . . .
Bouébo . . . .
Guibobli . . .
b - Niaho
Zagné . . . . . .
Vodélobly . .
Tienkoula . .
Djidoubaye .
Keibly . . . . .
Zaipobly . , .
Gahably . . . .
. . .
. . .
. . .
. . .
. . .
. . .
. . .
b-Do0
Kati . . . . . . . . . . .
Nounoubaye . . .
Petit-Guiglo . . .
Ponan . . . . . . . . .
Ditroudra-Béoué
. . . . ...... 1 268
. . . . ...... 575
. . . . ...... 1 556
. . . . ...... 422
. . . . ...... 1 318
. . . . ...... 67
. . . . ...... 653
. . . . ...... 756
. . . .
. . . .
. . . .
. . . .
. . . .
. . . .
. . . .
. . . . . .
. . . . . .
. . . . . .
. . . 677
. . . 299
. . . 90
. . . 185
. . . 155
. . 550
. . 205
. . 258
. . 848
. . 1 019
. . 305
. . 68
. . . 544
. . . 230
. . . 225
. . . 188
. . . 427
LA MISE EN PLACE DES POPULATIONS GUÉRÉ ET WOBÉ (FIN) 55
9. Groupement Nidrou
Bohibli . . . . . . . .
Tahibli . . . . . . . .
Mayoubli . . . . . .
Péhé . , . . . . , . . .
Pantrokin . . . . .
Sahibli . . . . . . . .
Guiellé . . . . . . . .
Ziombli . . . . . . .
10. Groupement Béhorra
Toulépleu ......
Toulépleu-village
Seizaibli ........
Zoguiné ........
Gueya .........
Tiobli ..........
Klobli ..........
Bazobli .........
Klaon ..........
. .
. .
. .
. .
11. Groupement Welao
Bakoubli .........
Seibli ............
Kambli ...........
Pantroya .........
. .
. .
. .
. .
. .
. .
. .
. .
. .
. . . . . 677
. . . . . 611
. . . . . 437
. . . . . 920
. . . . . 1 134
. . . . . 772
. . . . . 793
. . . . . 825
. . . . 2 992
* . . . 1 118
. . . . 826
. . . . 296
. . . . 305
. . . . 601
. . . . 728
. . . . 661
. . . . 262
....... 1 023
....... 572
....... 747
....... 389
12. Groupement Mao
Péhé-Kanhouébli . . . . . . . . . . . . . 700
Bobli (Douhozé) .
Dénan . . . . . . . . .
Méo . . . . . . . . . . .
Douhozon . . . . , .
Paoulo . . . . . . . . .
Diai . . . . . . . . . . .
Crié . . . . . . . . . . .
Bohobli . . . . . . . .
Kpabli. . . .
Ourialé . . .
Cébli . . . .
Diollé . . . .
Toyébli . .
Grépleu. . .
Koaro . . .
Ziouébli . .
Kouyabli . . . .
Sahoubli . . . .
Kpaoubli . . . .
. . . . . .
. . . . . .
. . . .
. . . .
. . . .
. . . .
. . . .
. . . .
* .
391
588
773
283
284
338
362
462
. . 431
. . 1 151
. . 134
. . 920
. . 796
. . 160
. . 480
* . 151
...... 118
...... 93
...... 257
N.B. : Ces données chiffrées, pour être tout à fait exactes, devraient tenir compte de la population
étrangère présente dans chaque groupement. Si les étrangers sont généralement peu nombreux dans
les villages, ils constituent par contre une importante fraction de la population des centres semi-urbains :
fonctionnaires et, surtout, commerçants Dioula. Par manque de renseignements suEisamment précis
nous avons préféré ne pas effectuer la correction.
56 Alfred SCHWARTZ
« Liste des cartes ayrzt paru dans les deux ntrn~éros successifs des cahiers 0 RSTO M ».
1'" Partie : CaR. 0 RSTOM. sér. Sri. Ham. sol, V, na 4, 1968, pp. 3-38.
- carte de Côte d'ivoire, p. 6.
.- carte des populations wobé, p. 17
- carte des populations guéré entre Ko-Nzo et Sassandra, p. 24.
2' Partie : Cah. ORSTOM. sér. Sri. Hum. vol. VI. 11' 1, 1969, pp. 3-58.
- carie du pays Zérabaon, p. 10
- carte du pays Boo, p. 12
- carte du pays Fléo-Niaho et Daho-Doo, p. 15
-- carte du couloir entre Nuon et Cavally, p. 21
- carte de l'implantation de noyaux Séhou ou Sehinou, p, 23
- carte des populations guéré et wobé (habitat ancien et implantation actuelle), p. 26
- les origines du peuplement, p. 31
- pénétration française dans la région de Man, p. 33
- le pays guéré et wobé, carte administrative, p. 43
- le pays wé, groupements traditionnels, p. 43.

(d'après A. Schwartz)


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